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Accès au dossier médical : Droit du patient ou parcours du combattant ?

Accès au dossier médical : Droit du patient ou parcours du combattant
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Comment faire valoir votre droit d’accès au dossier médical ?

Par Handilex. Quand le corps est atteint, l’obtention de son dossier médical est la première étape nécessaire pour faire valoir ses droits. Pourtant à l’heure de la dématérialisation, il reste très difficile d’en obtenir la communication : qui peut demander l’accès au dossier médical ? A qui faut-il s’adresser et comment ? Quel doit être la qualité du dossier reçu retraçant le parcours de soins faisant litige ?

Communication du dossier : Comment et à qui ?

Dossier médical : de quoi s’agit il ? Celui-ci contient non seulement le dossier du médecin, mais aussi le dossier administratif et celui des soins infirmiers, ce sont ces trois volets qui forment le dossier médical. Il doit être conservé par l’établissement de soin 20 ans après le séjour ou au moins jusqu’au 28 ans du patient, 10 ans après le décès si le décès intervient dans les 10 ans après le séjour, 30 ans lorsque le patient bénéficie d’une transfusion. Ce « dossier du patient », appellation plus fidèle à la réalité et à son contenu, est couvert par le secret médical, droit absolu du patient. En conséquence, en principe, seul le patient peut faire la demande de communication de son dossier médical : contrairement à l’idée reçue l’avocat ne peut en faire la demande pour son client.

Comment ? Selon l’article L.1111-7 du Code de la Santé publique, la communication est de droit (la demande n’a pas à être justifiée) et doit être faite directement à l’intéressé. Le plus simple : faire la demande par courrier recommandé avec accusé de réception adressé au directeur de l’établissement en faisant explicitement références à l’article L.1111-7 précité et en mentionnant les périodes d’hospitalisation, avec copie de sa carte d’identité. A savoir : les frais de reproduction peuvent être facturés au demandeur. La copie doit être adressée dans un délai de 48 h et 8 jours à compter de la réception de la demande sauf si le dossier à plus de 5 ans. Si la loi ne prévoit pas de sanction à cette obligation, le retard ou l’absence de communication peut néanmoins, selon le juge administratif, constituer une faute en soi, susceptible d’engager la responsabilité de l’établissement[1].

A qui le dossier peut être transmis ? Au patient lui-même, à ses ayants droits pour trois raisons : connaître les causes de la mort, défendre la mémoire du défunt ou faire valoir leurs droits[2]. Bien évidemment, ceux-ci devront justifier de leur lien avec le défunt (copie du livret de famille…).

Obligation de « bonne tenue » du dossier

L’enjeux : En matière de responsabilité médicale, c’est au patient-victime de prouver l’existence d’une faute médicale ayant causé le dommage qu’il subit. Un dossier médical complet est donc le seul moyen de parvenir à établir les responsabilités éventuelles et obtenir la réparation intégrale de ses préjudices.

L’accès au dossier médical en cas de dossier incomplet ou de perte : les expertises mettent souvent en lumière l’absence de pièces du dossier médical rendant plus complexe voire impossible l’analyse des responsabilités. En pareille hypothèse, c’est la faute médicale qui est présumée : c’est dès lors à l’établissement de prouver le caractère approprié des soins délivrés et l’absence de faute[3]. De la même manière, en cas de perte du dossier, la Cour de cassation a récemment affirmé que celle-ci constitue « un défaut d’organisation et de fonctionnement, qui place le patient ou ses ayants droit dans l’impossibilité d’accéder aux informations de santé le concernant et d’établir, le cas échéant, l’existence d’une faute dans la prise en charge » le principe d’un renversement de la charge de la preuve[4]. C’est donc un régime de présomption de faute qui est en train d’émerger au profit du patient. Enfin, selon la Cour de cassation, la perte d’une chance pour le patient d’obtenir réparation du dommage subi du fait d’un dossier médical incomplet ou de la perte de celui-ci peut constituer un préjudice autonome et réparable en soi.

 

En conclusion : L’accès au dossier médical est un droit pour le patient a fortiori lorsqu’il subit un préjudice. La loi a tracé indiscutablement les contours de cet accès. Les juges s’orientent vers la sanction d’une faute autonome pour un dossier incomplet, ou mal renseigné. Force est de constater que cette obligation de « bonne tenue » est profitable à tous les acteurs de santé confrontés à un procès.  

Viridiana FERNANDEZ-DELPECH, Avocate au barreau de Toulouse, secrétaire générale de l’association Handilex Occitanie

Jean-Armand MEGGLÉ, fondateur d’Handilex

[1] TA Paris 9 mars 2018, n°1710350.

[2] Il n’est pas abordé la question de la communication au patient mineur, au patient majeur protégé ou au patient hospitalisé sans consentement nécessitant un développement plus précis.

[3] Cass. 1re civ., 9 avril 2014, n° 13-14.964,

[4] C. Cass, 1ère Ch. Civ. : 26 septembre 2018 (n°17-20143).

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