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Habitat partagé et autisme : Le projet LOGITED se concrétise à Lyon

Habitat partagé et autisme : Le projet LOGITED se concrétise à Lyon
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Après 7 ans de travail acharné, le projet LOGITED porté par l’association AREVALE et destiné à loger 6 personnes autistes dans un habitat partagé va enfin se concrétiser.

En photo : Les futurs locataires et leurs familles en visite sur le chantier de LOGITED, où un logement permettra de concilier habitat partagé et autisme.

Rencontre avec Mireille Lemahieu, ex-présidente d’Autisme France, présidente d’AREVALE et de l’Union Régionale Autisme, et mère d’un enfant autiste. Elle nous présente le projet d’habitat partagé et inclusif “LOGITED” porté par le réseau AREVALE. Ouverture prévue à Lyon le 15 avril 2022.

Ce projet, que nous avons appelé LOGITED, est porté par l’association AREVALE, qui signifie « Autisme Répit Éducation Vacances Aide au logement et à l’Emploi ». Celle-ci a été créée en 2010, sur le constat départemental qu’il n’y avait pas d’association concernée par les adultes autistes en milieu ordinaire ou ayant la capacité ou les possibilités de vivre en milieu ordinaire et d’accéder à un travail (emploi, bénévolat…) et à un logement.

AREVALE fait partie du réseau « Autistes sans frontière », qui est une association nationale et à l’initiative du collectif national autisme. Cette association est particulièrement tournée vers l’accompagnement inclusif. Mais la recherche d’un habitat partagé pour 6 personnes autistes a commencé il y a 7 ans. C’est Mireille Lemahieu, ex-présidente d’Autisme France, présidente d’AREVALE et de l’Union Régionale Autisme et mère d’un enfant autiste, qui nous explique les contraintes de ce type de projet.

Quels sont les besoins auxquels se confrontent les personnes autistes en matière de logement ?

Cela dépend de leurs capacités, de leur autonomie, de leurs aptitudes, du chemin parcouru et de leur désir, ou non, de partir de chez leur parent. Elles disposent de la possibilité d’aspirer à vivre dans un logement de droit commun mais n’ont pas toujours la capacité de vivre seule. Je ne parle pas ici des foyers d’hébergement et notamment ceux liés aux ESAT. Au final, il n’y a que très peu de solutions de vie en autonomie sans être seul. C’est à la fois un problème d’intendance, de gestion du temps, du planning, de gestion des moyens, mais aussi d’angoisse liée à la solitude mais cela n’a rien à voir avec le fait d’avoir ou non des comportements inadaptés. Ceux qui peuvent vivre seul ont la plupart du temps le support de leur famille. L’une des principales difficultés des personnes autiste est d’initier une action, bien qu’elles soient capables de faire les choses. Même si elles ont appris, il leur faut vraiment du temps, et le plus souvent elles ne le font pas. Par exemple, une personne sait qu’elle a un rendez-vous mais elle n’y va pas. C’est souvent pris pour de la négligence mais c’est de l’incapacité. Ce n’est parce qu’elles le peuvent qu’elles vont le faire et c’est propre à toutes les personnes autistes.

En matière de logement, quelles sont les solutions à mettre en œuvre ?

Tout dépend des habitudes de vie de la personne. Certaines aiment vivre en milieu rural avec de activités rurales, avec un habitat parfois situé au cœur d’une activité, comme dans le cas d’une activité artisanale. D’autres sont plus urbaines et préfèrent vivre dans un milieu plus dynamique, mais, en général, ces personnes fuient les transports en commun, bien que ceux-ci soient incontournables dans certaines situations. Dès lors, la personne va chercher à être proche de son lieu de travail ou de sa famille. Il sera souvent nécessaire de prévoir un accompagnement humain, au moins au début.

En termes de présence humaine, quelles sont les recommandations ?

La première chose que l’on fait, c’est de partir des besoins de la personne, venant de la personne elle-même. Si nécessaire, un neuropsychologue peut aider la personne à évaluer ses besoins. Nous avons fait une petite évaluation sur la base de 6 personnes qui vivent chez leurs parents dans la perspective d’un logement partagé et accompagné. Cela nous a permis de connaître les besoins en étayage de chacune. Nous avons regardé comment se déroulait leur emploi du temps. La question de ce futur logement était de savoir à quel moment un accompagnement était nécessaire au niveau du groupe. Nous avons pu établir une répartition de cette présence aidante pour chacun en fonction des besoins individuels et pour le groupe. Aujourd’hui nous sommes dans l’attente d’une réponse pour le financement, d’une part de la MDPH (PCH, Prestation de Compensation du Handicap, ici avec la contribution d’un service d’aide à domicile), et d’autre part, du tout nouveau dispositif d’aide à la vie partagée (AVP).

En quoi consiste l’aide pour l’habitat partagé notamment en lien avec l’autisme ?

L’Aide à la Vie Partagée est attribuée uniquement pour l’aide humaine du groupe, c’est-à-dire pour l’animation et la coordination de l’habitat proprement dit. Elle est estimée en fonction des besoins de chacun mais attribuée au porteur de projet. Nous avons demandé un accompagnement à 3/5eme de temps pour le groupe actuel. Pour chacun des futurs habitants, nous aussi avons demandé une PCH, mais pour l’un et l’autre les réponses se font attendre. Nous devions avoir une réponse de principe de la Métropole de Lyon fin octobre, et mi-décembre nous n’avons toujours pas de nouvelles, les crédits étant abondés par 80% la CNSA et 20% la Métropole. Ce mode de financement étant très récent, il y a du retard à sa mise en place.

Ce projet d’habitat partagé fait partie d’une résidence d’«Habitat et Humanisme», bailleur social associatif, au sein de laquelle il y a  aussi une association de personnes sourdes. C’est une résidence intergénérationnelle qui développe une vie sociale très active. Au rez-de-chaussée de la résidence, le Groupe d’Entraide Mutuel TSA (GEM Troubles du Spectre de l’Autisme) proposera des activités, des loisirs, des animations et la construction de projets participatifs organisés par les personnes TSA elles-mêmes.

AREVALE est la marraine de ce premier GEM TSA sur le territoire. La résidence comprend un large atrium, un jardin et des espaces collectifs où chacun pourra se croiser et nouer des liens. Cette résidence se situe sur Villeurbanne, à proximité de Lyon 3, à côté du tramway T3, de bus et assez proche du métro. Le bâtiment sera livré en avril 2022 mais portant ce projet depuis 2016, c’est pour dire à quel point c’est long et lourd. Nous avons mis 2 ans à trouver un bailleur social qui ait une possibilité pour ce type de projet. Les délais et recours se sont ensuite succédés pour un début des travaux février 2020, soit le pire moment, compte tenu de la crise sanitaire. Il a fallu beaucoup de ténacité à notre équipe-projet, entièrement bénévole, pour mener à bien ce projet et ce n’est pas fini.

Le bâtiment dans lequel le projet d’habitat partagé d’AREVALE prendra place à partir d’avril 2022.
Le bâtiment dans lequel le projet d’habitat partagé d’AREVALE prendra place à partir d’avril 2022.

Le bâtiment dans lequel le projet d’habitat partagé d’AREVALE prendra place à partir d’avril 2022.

Comment cela se passe pour le bail ?

Chaque occupant aura un bail individuel de droit commun. Les baux sont récupérés par AREVALE qui les transmettra au bailleur social.

Qu’en est-il pour la gestion du quotidien lorsqu’on concilie habitat partagé et autisme ?

Ce sera le rôle de l’animateur et de l’aide à domicile, d’aider à faire les courses, de superviser les repas, le ménage… Sachant que pendant la semaine, 5 résidents sur 6 déjeuneront sur leur lieu d’activité ou de travail. La question se pose donc essentiellement pour les soirées. L’une des difficultés réside dans le fait que l’animateur ne peut être recruté qu’une fois le financement débloqué. Il ne peut, de fait, pas faire suffisamment connaissance avec les habitants avant l’installation dans LOGITED. AREVALE va donc avancer un mois de salaire pour que l’animateur puisse rencontrer les personnes et les familles en amont. Autre difficulté, trouver une personne qui veuille bien travailler 3/5éme de temps avec un bon sens des relations humaines et des qualités administratives.

Comment avez-vous pu garder espoir durant toutes ces années ?

Nous sommes restés très proches du réseau « Habitat partagé et accompagné ». Nous avons participé à leur première rencontre nationale à Strasbourg,  en 2017. J’ai rencontré des personnes formidables et découvert des projets magnifiques pour des personnes extrêmement dépendantes qui relevaient de ce que nous envisagions. « Habitat partagé et accompagné » lance des appels à projet pour de l’accompagnement administratif et logistique. En 2020, nous avons postulé et nous avons été retenus pour bénéficier de cet accompagnement. Nous faisions partie de 8 projets retenus sur 90 candidatures, et le seul sur la Région Auvergne Rhône-Alpes, ce qui a fait notre fierté.

Pour en savoir plus sur le réseau AREVALE, rendez-vous ici : https://reseau-arevale.fr/qui-sommes-nous/

Propos recueillis par JMMC

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