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Handicap et Emploi : des mots, toujours des mots ?

Handicap et Emploi : des mots, toujours des mots ?
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Accéder à l’emploi, conserver son emploi, changer librement d’emploi sont de vrais défis. Ce parcours est encore plus difficile pour les personnes en situation de handicap. Handicap et emploi pourrons t-ils se conjuguer un jour naturellement ? Par Handilex.

Le droit au travail, un droit fondamental
Le droit au travail est un droit fondamental, solennellement affirmé : “Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ». Il appartient au Législateur de « poser les règles propres à assurer au mieux le droit pour chacun d’obtenir un emploi en vue de permettre l’exercice de ce droit au plus grand nombre d’intéressés » selon le Conseil Constitutionnel[1]. Donner un emploi à chacun, en dépit de sa différence, de ses aptitudes, de ses origines, de sa condition…. En d’autres termes, il s’agit de favoriser l’emploi des personnes fragilisées, d’instaurer un système protecteur, et de lutter contre les discriminations.

Handicap et accès à l’emploi : le gouffre entre l’ambition de protection du droit et la réalité
De nombreux mécanismes visant à protéger la personne handicapée, pour l’embauche, le maintien et la rupture du contrat de travail, et à inciter à l’emploi, sont institués par la loi. Certains obligent l’employeur : à partir de 20 salariés, il est tenu d’employer des travailleurs handicapés dans une proportion de 6% de son effectif sous peine de devoir s’acquitter d’une contribution financière annuelle à l’AGEFIPH. D’autres promeuvent l’inclusion au travail de la personne : Reconnaissance de la Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH) permettant de sensibiliser l’employeur, et d’avoir accès aux dispositifs spécifiques visant à favoriser l’accès et le maintien dans l’emploi : contrat de rééducation professionnelle, dispositif d’emploi accompagné, entreprises adaptées, etc. Également, l’AGEFIPH, créée en 1987, propose services et aides financières telles que le dispositif de reconnaissance de la lourdeur du handicap (RLH) permettant de compenser la productivité réduite ou d’aménager les postes de travail.

Pour autant, les statistiques sur le taux de chômage des personnes en situation de handicap sont édifiantes : 18% [2] pour 2018, soit le double de celui des valides ! Les personnes handicapées connaissent aussi des périodes de chômage plus longues. 30 ans après la loi de 1987 qui a créé l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés, le taux d’emploi direct dans les entreprises du secteur privé est de 3.4% pour une cible à 6%. Le handicap reste ainsi l’une des premières causes de discrimination à l’emploi et dans l’emploi.

Accéder à l’emploi, garder son emploi : la lutte contre les discriminations doit être renforcée !
Les difficultés d’accès ou de maintien dans l’emploi des personnes handicapées sont liées à des facteurs externes : besoin important de mobilité ou de polyvalence, absence d’accessibilité des lieux de travail, etc. De nos jours, un handicap reconnu divise par trois la probabilité d’être employé. Certains préfèrent donc ne pas déclarer leur handicap (quand il est invisible) par peur des discriminations. Or, la discrimination dans l’emploi du fait du handicap est interdite (article L.1132-1 du Code du travail). Cependant, là aussi la réalité est bien différente. En 2017 et pour la première fois, le critère handicap est passé en première position des discriminations à l’emploi avec près de 22% des motifs de saisines du Défenseur des droits.

Peut-on perdre son emploi en raison de son handicap ?
Le handicap ne peut en aucun cas être la cause du licenciement. Il s’agirait alors d’une discrimination prohibée (le salarié discriminé pourrait alors solliciter sa réintégration, le licenciement étant entaché de nullité). En revanche, l’inaptitude physique du salarié à son poste de travail peut fonder la rupture du contrat. Celle-ci doit être constatée par le médecin du travail, peut être d’origine professionnelle ou non. Dans les deux cas, l’employeur est tenu d’une obligation de recherches de reclassement avant de mettre un terme définitif au contrat, au terme d’un préavis dont la durée est doublée. Les indemnités seront différentes si l’inaptitude est d’origine professionnelle ou non.

En conclusion, la clef de l’évolution de l’emploi des personnes handicapées ne réside pas tant dans le droit, déjà très protecteur notamment en cas de rupture du contrat de travail, que dans la lutte contre les préjugés, les présomptions d’inefficacité et les discriminations, contre lesquels tous les acteurs doivent se mobiliser.

Marie BELLEN-ROTGER, Sabrina VIDAL, Elodie BONNEFOUS, Avocates au barreau de Toulouse, et membres d’Handilex Occitanie

[1] Décision du 28 mai 1983
[2] Source : étude AGEFIPH

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