Par Hélène Morisseau. Pour cette nouvelle chronique, Hélène Morisseau s’est intéressée au tennis handisport paralympique. Elle est allée à la rencontre d’Emmanuelle Mörch et de Yann Maître.
Emmanuelle Mörch est l’un des grands espoirs féminins du tennis en fauteuil. Cette jeune femme de vingt-cinq ans met tout en œuvre pour participer aux Jeux Paralympique s de Rio en septembre 2016.
« Être dans le top 22 » : c’est l’objectif de cette sportive handi. Même si elle essaye de se détacher de cette obsession du classement, pour éviter trop de pression, son entourage, ses amis ou même les gens qui la rencontrent ne peuvent s’empêcher de lui poser la fameuse question : « Alors quel est ton classement ? ». Au 23 mai 2016, les vingt-deux meilleures joueuses mondiales du classement ITF (International Tennis Federation) décrocheront le graal suprême : participer à la grande fête du handisport à Rio. Mais il sera toujours possible d’obtenir une wild card pour compléter un double. Chaque pays ne pourra présenter plus de quatre joueurs dans cette discipline. Pour l’instant, Emmanuelle pointe à la 25ème place en simple et à la 12ème place en double, où elle a connu une forte progression après sa victoire à l’Open Handisport de l’Ile de Ré – associée à une joueuse sud-africaine. C’est la chasse aux points pour remonter dans le classement. Il s’agit pour cela de s’inscrire à un maximum de tournois internationaux pour jouer, rivaliser avec les meilleures joueuses mondiales, améliorer son jeu et son classement ITF.
La progression est assez fulgurante pour Emmanuelle qui, si elle était très sportive avant son accident, ne pratiquait pas le tennis. « J’ai découvert le tennis fauteuil en 2009 lors d’un stage découverte mais je n’ai commencé à suivre des entrainements réguliers qu’à partir de 2011 lorsque j’ai eu un peu plus de temps pour le faire », précise-t-elle. Sa progression vers le haut niveau sportif s’est faite naturellement. Le soutien des sponsors privés a été déterminant pour franchir un palier. Ce sport lui permet surtout d’avancer dans sa nouvelle vie. Alors Emmanuelle n’hésite pas en 2014 à passer six mois aux Pays-Bas pour s’entourer d’un des meilleurs entraineurs de tennis en fauteuil. Eloignée de sa famille et de ses amis, son point d’équilibre, elle n’hésite pas à sacrifier la moitié d’une année pour suivre un entrainement intensif. Les retombées au niveau des résultats sont pourtant loin d’être immédiates. « Ce n’est parce que tu augmentes ton niveau de jeu à l’entraînement, que tu élèves forcément ton niveau de jeu en match », explique Emmanuelle. Le tennis en fauteuil reste un sport très exigeant physiquement puisque la règle d’or est que le fauteuil ne doit jamais être à l’arrêt. La seule différence avec le tennis valide est de pouvoir laisser rebondir la balle deux fois ce qui est assez rare à haut niveau. C’est seulement depuis cette année qu’Emmanuelle constate le bénéfice de son séjour hollandais qui se traduit concrètement par des victoires et des matchs accrochés contre des joueuses du top 15. Si cette sportive se consacre à 100 % au tennis fauteuil, elle n’en oublie pas pour autant d’assurer son avenir professionnel. Elle est sur le point d’obtenir son diplôme d’ingénieur à l’École Centrale de Paris (sa soutenance de fin d’études est imminente), mais elle a décidé de reporter son immersion dans le monde du travail après Rio. Elle ne s’accorde pas de vacances, passe beaucoup de temps dans les avions, et consacre un peu de temps à son entourage entre deux tournois. L’enchainement des tournois lui laisse même peu de temps pour l’entrainement. La joueuse nous donne une idée de son quotidien : « Le rythme imposé par les tournois est soutenu. Je passe actuellement trois semaines par mois à l’étranger. C’est fatiguant. J’essaye de faire attention, de rester en forme et de privilégier la récupération ». Son duo d’entraîneurs d’Antony Sports Handi-Club la retrouvera sur les courts presque tout le mois de décembre – une période plus calme. Ce sera l’occasion de peaufiner son jeu en double avec la triple championne de France, Charlotte Famin, qui fait partie du même club. Mais dès le mois de janvier 2016, elle quittera la région parisienne pour participer à trois tournois en Australie. Il ne restera alors plus que quelques mois à Emmanuelle pour élever son niveau de jeu et glaner de précieux points. Sa détermination, sa force de caractère et un fort mental devraient lui permettre d’atteindre son objectif brésilien. Et pourquoi ne pas décrocher une médaille ? « Gagner une médaille en double avec Charlotte, ce serait incroyable ! », s’enthousiasme Emmanuelle que l’on vient de plonger dans les rêves les plus fous…
Trois questions à Yann Maître, directeur du Toyota Open International de l’Ile de Ré
Le Toyota Open International de l’Ile de Ré attire chaque année les meilleurs joueurs masculins et féminins de tennis handisport et constitue ainsi l’un des plus gros tournois mondiaux du circuit. Rencontre avec le Directeur de ce tournoi, Yann Maître.
Comment s’est passée la 11ème édition du tournoi ?
« Cela a été très compliqué à gérer avec une météo pluvieuse en début de semaine. Il a fallu reporter les matchs car les courts sont en extérieur. On s’en est sortis mais non sans difficultés. Heureusement la fin de semaine a été plus clémente et les finales ont attiré près de trois cents spectateurs ».
Comment expliquez-vous l’engouement pour ce tournoi ?
« Déjà c’est un tournoi qui est bien placé au niveau du calendrier. Et puis, la destination touristique attire les joueurs français bien évidemment mais aussi les anglais, les américains… Toutes catégories réunies, 110 joueurs se sont inscrits dont 25 quads ».
Quel regard portez-vous sur le niveau actuel du tennis handisport français ?
« Il est excellent chez les hommes avec Stéphane Houdet (n°2 mondial) et Nicolas Peifer (n°3 mondial), le vainqueur du tournoi cette année. Il y a deux autres joueurs français classés dans le top 15. Chez les femmes c’est plus mesuré. La relève de Florence Gravellier est compliquée. Mais Charlotte Famin et Emmanuelle Mörch font partie de ces nouvelles joueuses qui ne sont pas loin et qui travaillent dur ».