Être ParHands : Un lieu de rencontres et de partage d’expériences entre parents en situation de handicap
Delphine Siegrist et Carine Moiroud sont co-animatrices du groupe « Être ParHANDs » avec Vincent Plazy, coordinateur de Résol’handicap au sein de l’APF. Le collectif propose une entraide entre parents en situation de handicap.
« Être ParHANDs », qu’est-ce que c’est ?
« Être ParHANDs » est un collectif qui s’est créé au départ avec un petit groupe de parents en situation de handicap qui venaient pour connaître leurs droits à l’APF. Très vite ils ont voulu rencontrer d’autres parents. C’est comme ça qu’est née l’idée de créer quelque chose. Cela a pu se concrétiser grâce au soutien très fort de la délégation APF du Rhône à Villeurbanne, et plus particulièrement via Résol’handicap. Historiquement, « Être ParHANDs » est un collectif basé sur la région Auvergne-Rhône-Alpes. En 2013 il y avait déjà une association qui s’appelait « Être parent », créée par Louise Marie-Avril, qui a notamment été présidente du GIHP. Elle est décédée et l’association a été dissoute suite à cela. Nous nous inscrivons dans cette histoire, dans la veine de ce qui a été fait avant sur le même territoire, et qui a finalement ressurgi. Aujourd’hui le collectif est composé d’une quinzaine de personnes. Deux membres, Guy (aujourd’hui décédé) et Laure sont à l’origine du groupe. Le collectif avance avec les rencontres et les nouveaux parents qui nous rejoignent. C’est avant tout un lieu de rencontres, de partage, d’entraide, de convivialité… et c’est déjà beaucoup, car lorsque l’on a quelque chose de trop lourd à porter on peut en parler avec des pairs, des personnes qui vivent les mêmes situations ou qui les ont déjà vécues.
À qui s’adresse le collectif « Être ParHANDs » ?
Le collectif s’adresse à tous les papas et mamans en situation de handicap, à l’exception des parents en situation de handicap mental, car c’est bien spécifique et nous ne sommes pas en mesure de les accompagner actuellement. Nous n’accueillons pas non plus les parents d’enfants handicapés (sauf si ces parents sont eux-mêmes en situation de handicap), d’autres associations s’en occupent.
Quelles sont les différentes actions menées par ce collectif ?
Comme nous sommes de jeunes parents dynamiques, nous avons de jeunes enfants à l’école. En parlant nous avons vite constaté qu’il n’était pas toujours évident de jouer notre rôle de parent d’élève. Nous sommes intervenus deux fois en formation des nouveaux directeurs d’école pour les sensibiliser au fait qu’il n’y a pas que des enfants en situation de handicap dans leurs classes, mais qu’il y a aussi à l’école des familles avec parfois des différences… Le but étant de leur donner un regard et un accueil bienveillant. On ne demande pas qu’ils connaissent toutes les formes de handicaps, mais qu’en tant que professionnels ils soient capables d’accueillir toutes les familles, et qu’ils soient ouverts… car nous avons parfois des situations de blocages, des préjugés… Lors de nos interventions nous avons présenté nos témoignages de situations vécues avec l’école. Par exemple, le cas d’un parent aveugle qui avait signé une autorisation de sortie et pour lequel les encadrants n’ont pas cru l’enfant. On a expliqué qu’il était normal qu’une personne aveugle ou malvoyante puisse écrire mal. On part toujours de témoignages concrets.
Les actions sont aussi menées dans le groupe en fonction des situations de chacun. Par exemple Carine travaille à l’ARS. En parlant du collectif, elle a rencontré quelqu’un qui travaille en PMI, et de fait on va commencer un travail de sensibilisation avec une responsable de PMI sur le bassin Rhône-Alpes-Auvergne. En effet, nous nous sommes aperçus à travers les témoignages collectés que les rapports avec les PMI sont parfois très conflictuels, avec par exemple des mamans qui ont fait l’objet de signalements au juge par des collègues ou responsables estimant que l’enfant était en danger potentiel ! Ce n’est pas parce qu’on est en situation de handicap et qu’on n’a pas forcément une gestuelle qui correspond à tout ce qui est normé, que pour autant l’enfant est en danger. C’est une situation très grave pour les parents car cela signifie qu’ils peuvent se voir imposer des mesures éducatives, voire le retrait de leur enfant. Il y a un vrai manque d’information de la part de certains professionnels. Notre volonté est vraiment de travailler avec eux et de faire diminuer toutes les représentations erronées qui existent.
En France où en est-on aujourd’hui en matière de parentalité ?
Autant il y a eu beaucoup de travail mené ces dernières années autour de la sexualité et du handicap, autant le thème de la parentalité des parents en situation de handicap est l’un des tabous qui demeurent. Au-dessus de ça il y a en fait la trouille de la société de voir se reproduire à l’identique le handicap du parent chez l’enfant. Ce préjugé s’inscrit dans l’histoire. Dans la littérature, on retrouve ainsi des écrits datant de la fin du 19e siècle où il est clairement stipulé que les femmes déficientes visuelles ne devaient pas envisager de devenir maman. La parentalité a été inscrite dans un texte depuis décembre, sous l’impulsion très proactive d’Handiparentalité et d’autres associations. Nous attendons le décret d’application.
En pratique, des choses ont été faites à Paris avec le SAPPH (Service d’accompagnement à la parentalité des personnes handicapées) notamment, un film sur la maternité a été réalisé par la MNH, des maternités proposent un accompagnement particulier à Lille et Strasbourg, un groupement de parents en situation de handicap à l’APF travaille avec la maternité de Rennes. À Bordeaux, Florence Méjécase, créatrice de l’association Handiparentalité travaille avec le Centre Papillon. Sur Lyon c’est encore compliqué, on espère qu’un pôle ressources pourra se monter à l’image de ce qui se fait à Paris, Strasbourg, Lille… Nous rencontrons beaucoup d’acteurs pour nous faire connaître et essayer de développer une synergie en ce sens.
Propos recueillis par Caroline Madeuf