Brigitte Bricout, présidente battante au sein de l’association FDFA, Femmes pour le dire, femmes pour agir
Découvrez le portrait de Brigitte Bricout par Caroline Lhomme.
Brigitte Bricout, charmante blonde au sourire éclatant, a été rattrapée par les séquelles d’une poliomyélite il y a quelques années. Elle a toutefois toutes les apparences et surtout toute l’énergie d’une femme valide. Elle a longtemps travaillé dans le domaine des ressources humaines. Ce sont toutes ses belles qualités qui lui ont valu, en juin dernier, d’être élue au poste de présidente de l’association Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir.
Un parcours dans les RH
Brigitte a suivi ses études de droit à l’Université Panthéon-Sorbonne avant de rejoindre le monde de l’entreprise où elle a mené sa carrière de juriste en droit social avant de se tourner vers les relations humaines. En découvrant l’économie et le droit social, en étudiant le mouvement ouvrier, elle a rapidement découvert sa voie. « Dans ce monde complexe, l’économie ne va pas sans le social, et il était important que je m’investisse en fonction du respect de cet équilibre. » Elle hésite entre devenir avocate ou entrer dans l’entreprise. « J’ai commencé en qualité de conseil puis j’ai intégré l’entreprise au sein d’une direction des ressources humaines en tant que juriste en droit social puis la fonction des Ressources Humaines. »
DRH dans des multinationales, elle a développé sa vision des relations dans l’entreprise au sein de comités de direction. Engagée dans l’égalité Femmes/Hommes, elle s’est attachée à faire progresser le pourcentage de femmes recrutées à des postes de responsabilité. Elle est aussi à l’origine d’un programme d’intégration des personnes en situation de handicap dès 2008. Brigitte continue quelques missions en Relations Humaines auprès d’entreprises.
La polio la rattrape à 52 ans
Rattrapée depuis quelques années par les séquelles d’une poliomyélite contractée dans l’enfance, Brigitte a vu ses activités professionnelles se ralentir. Elle se souvient : « Un jour, j’étais à la sortie d’un parking, l’ascenseur ne fonctionnait pas. J’ai monté un ou deux étages du sous-sol, par l’escalier. Pensant être arrivée au niveau de la rue, j’ai dit ouf. « Ciel ! me suis-je dit intérieurement, et en fait, j’étais bloquée devant ce nouvel effort à fournir et pour la première fois depuis bien longtemps, j’ai été submergée par une douleur profonde… Je me sentais anéantie par une incapacité à devoir monter ces « bon sang » de marches supplémentaires. C’est là que j’ai ressenti mon handicap… Oui, j’étais handicapée… ».
Devant ces marches, Brigitte revit son sentiment d’enfant qui n’arrivait pas à suivre le pas rapide de sa mère. Elle a 52 ans. « Ce fut une prise de conscience. Il fallait que je retourne à Garches pour comprendre ce qui se passait. En 2010, elle retourne à Garches et on lui fait des examens assez conséquents. Le corps médical a insisté pour la convaincre qu’elle devait faire autrement. « Madame, si vous continuez ainsi, dans trois ans vous ne marcherez plus. ».
« C’est ainsi que j’ai dû remettre en cause ma vie professionnelle qui était ma réussite dans mon parcours », commente-t-elle.
Rencontre avec l’association FDFA
C’est en 2010, lors de la première édition des Feuilles d’automne des écrivain.e.s handicapées et des autres, que Brigitte Bricout découvre l’association Femmes pour le Dire, Femmes pour Agir, dont elle devient immédiatement adhérente car, dit-elle : « FDFA m’a fait découvrir le monde du handicap chez la femme ! ».
Dès sa prise de fonctions, Brigitte a tenu à rappeler l’importance de poursuivre l’œuvre de Maudy PIOT, fondatrice de FDFA. Pour ce faire, de nouvelles administratrices ont rejoint le CA afin de former une équipe renforcée pour un travail collectif.
En tant que présidente de FDFA, Brigitte souhaite d’abord être à l’écoute de toutes les personnes en situation de handicap, de toutes les idées, propositions, des expériences de la vie à l’association. Elle veut aussi poursuivre les projets en cours, « construire ensemble l’avenir de Femme pour le Dire Femme pour Agir, en se remémorant la ligne directrice portée par Maudy, en n’essayant pas de la remplacer car c’est impossible, en donnant de l’énergie pour que l’Association continue à vivre et ce, toutes et tous ensemble ». Cette année, l’association s’engage auprès de Ladapt pour la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées dont le thème sera « Femmes, travail et handicap », sous le titre « Tous citoyennes ».
« Je peux donner du temps pour permettre à l’association d’être entendue par le monde du politique, de l’entreprise, du médical, des intellectuels…etc. L’association est faite pour les Femmes en situation de handicap et ces dernières doivent se reconnaître dans son discours et ses actions, autant qu’elles se reconnaissaient quand MAUDY disait ‘Les femmes en situation d’handicap connaissent une double sanction, celle d’être femme et celle d’être handicapée’ ».
Des soins fréquents
Sur le plan de la santé, Brigitte Bricout a besoin essentiellement de séances de kiné deux fois par semaine, au moins une heure. « Avec ce kinésithérapeute, qui a une bonne connaissance des polios, c’est au bout de trois ans que j’ai retrouvé un corps moins douloureux notamment au niveau de la colonne vertébrale et de la jambe gauche. »
Elle doit aussi faire régulièrement un contrôle de l’évolution du syndrome post-polio et de ses éléments (sommeil, problème du squelette, mobilité devenant de plus en plus restreinte avec l’âge, …). « Il faut prendre conscience qu’il y a eu de fortes épidémies dans les années 50. J’ai été atteinte en juillet 1958 à l’âge de 9 mois (la vaccination était à un an au début des années 1960/ 1961). »
La situation des polios en France est difficile. Nous sommes 55 000 en France et 150 000 en Europe. On parle des petits polios, mais ceux-ci ont grandi, et leurs séquelles les rattrapent. Nous ne sommes plus au temps des chirurgiens de l’époque (ils sont tous décédés), il n’y a plus de médecin aujourd’hui spécialisé dans la connaissance de la polio et les conséquences des séquelles de cette maladie qui était mortelle. Ce sont des généralistes qui doivent suivre les anciens polios. Il reste un médecin spécialisé à Montpellier, qui reçoit une fois par mois, et un chirurgien qui connaît bien les problèmes des polios, mais qui va prendre sa retraite… Chacun fait de son mieux pour être suivi dans des hôpitaux différents. Garches n’est plus la référence des polios.
Il n’y a pas de traitements réels. La France se distingue en gardant une médecine individualisée alors qu’il faudrait faire comme en Suède constituer une équipe multi-spécialités en voyant la personne comme un tout. Médecins, chirurgiens, kinésithérapeutes, psychiatre, aide sociale, matériels médicaux, pédiatre…apportant des réponses en tout genre. Nous nous sentons délaissés.
Des loisirs enrichissants
Brigitte s’investit dans l’association des amis de la fondation de la mémoire des déportés et contribue à la constitution de leur bibliothèque. Elle est aussi une artiste, elle peint de beaux tableaux, ce qui lui permet de s’évader.
« Ma découverte du dessin et de la peinture est mon havre de paix émotionnel et intellectuel. Je prends des cours pour me permettre de me développer dans la connaissance de certaines techniques. Mon professeur de dessin que j’aimais beaucoup et qui est partie d’un cancer, me manque. Le lien était très fort, car elle m’a fait découvrir la beauté du geste et de l’âme. Le dessin m’apporte un équilibre.
Caroline Lhomme
En photo : Brigitte Bricout © Mathieu Renaud