HOP : Lutter contre l’auto-stigmatisation et les stéréotypes sociétaux
Joanie Pellet, assistante de recherche, nous présente le programme HOP, qu’elle mène depuis mai 2018 avec son équipe, et notamment Caroline Suter, médiatrice de santé pair.
Pouvez-vous vous présenter ?
Infirmière de profession, je travaille actuellement dans le Laboratoire de Recherche Santé Mentale et Psychiatrie (LER SMP), dirigé par le Prof. Jérôme Favrod, à l’Institut et Haute Ecole de la Santé La Source (Lausanne, Suisse). Dans le cadre de mes activités, j’ai récemment terminé un travail de recherche sur l’auto-stigmatisation dans la schizophrénie, qui m’a permis d’obtenir un Master en Sciences Infirmières à l’Université de Lausanne. Dans le cadre du programme HOP, j’ai la chance de collaborer avec Caroline Suter qui est médiatrice de santé pair et qui fait partie de notre équipe de recherche.
Le programme HOP, qu’est-ce que c’est ?
Le programme HOP (Honnête, Ouvert et Prêt) est une intervention courte qui vise à diminuer l’auto-stigmatisation, en soutenant les personnes concernées dans leur décision de révéler ou non leur maladie psychique et de parler de leur rétablissement. HOP a été développé par Patrick Corrigan, professeur en psychologie à l’Institut de Technologie de l’Illinois et concerné lui-même par la maladie, qui considère que le dévoilement est non seulement une stratégie pour lutter contre l’auto-stigmatisation mais aussi une manière de militer contre les stéréotypes sociétaux. Une des particularités de HOP est que P. Corrigan et son collègue R. Lundin (médiateur de santé pair) se sont entourés de personnes avec des troubles psychiques pour valider la pertinence et l’utilité du programme, et nous souhaitons faire de même pour l’adaptation de HOP pour le contexte francophone.
Quels sont ses objectifs ?
L’objectif est de soutenir les personnes concernées par la maladie psychique face au dilemme du dévoilement, mais on ne cherche pas pour autant à convaincre des bénéfices à se dévoiler. Il s’agit d’aborder cette décision complexe avec les participants, de les aider à trouver la meilleure solution pour eux et de les accompagner dans leur choix. Le programme HOP est reconnu comme pratique basée sur des données probantes. Il permet clairement d’améliorer le fonctionnement général et le bien-être des participants et de diminuer le stress lié à la stigmatisation.
Comment se déroule le programme ?
Les participants assistent à trois séances d’1h30 puis, un moins plus tard, ils se retrouvent pour une session de rappel. Des groupes de 3 à 6 personnes sont privilégiés et les séances sont animées dans la mesure du possible par deux médiateurs santé pairs. Les participants reçoivent un manuel d’exercices, qui résume les points-clés des sessions et propose différentes activités sur les thèmes abordés. La 1re session aborde les avantages et inconvénients du dévoilement, à court et long terme. La 2e session présente différents degrés de dévoilement, allant de l’évitement social à la diffusion ouvertement de son expérience. Les participants discutent également des personnes « idéales » à qui se dévoiler, comment les « tester » et les réactions suscitées par le dévoilement. La 3e session permet aux participants d’apprendre à raconter leur histoire, choisir ce qu’ils désirent ou non partager, puis se termine par un récapitulatif de ce que chacun retient du programme et comment il envisage le futur. Un mois après, les participants se retrouvent pour une session de rappel afin d’échanger sur leurs intentions de se dévoiler ou non après avoir suivi le programme, de savoir s’ils l’ont fait, et d’évaluer cette expérience.
Pouvez-vous déjà nous parler des premiers résultats du programme ?
HOP est encore en phase de test, dans le cadre d’une étude pilote qui se déroule depuis mai 2018 dans trois institutions psychosociales en Suisse romande. L’objectif est d’évaluer la traduction française et l’adaptation au contexte suisse francophone. La participation et les retours des participants et des animateurs sont essentiels pour finaliser l’adaptation du programme. Nous ne sommes donc pas encore en mesure de communiquer des résultats, néanmoins les participants témoignent de leur réel besoin d’échanger sur cette question du dévoilement ou non de la maladie psychique et de son impact sur leur qualité de vie. L’approche groupale et l’animation par une médiatrice de santé pair sont également très appréciées car elles favorisent l’échange d’expériences.
Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?
Le dilemme du dévoilement et de l’auto-stigmatisation sont des préoccupations importantes à aborder dans un accompagnement vers le processus de rétablissement psychologique. Toutefois, on ne peut pas omettre que les personnes atteintes de troubles psychiques restent particulièrement discriminées, rejetées, et jugées négativement par la société, et que le non-dévoilement n’est pas un mensonge mais parfois une protection salvatrice.
Plus d’infos : http://www.seretablir.net
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Contact mail : [email protected] et [email protected]
En photo : Les membres de l’équipe du programme HOP.