L’apprentissage, composante clé de la politique Handicap de Thales
Dans le cadre des nouveaux aménagements de la loi Pénicaud, l’apprentissage et la formation sont les axes majeurs de l’accès à l’emploi. L’accent est mis en particulier sur les personnes en situation de handicap qui, jusqu’à présent, se dirigeaient peu dans ces filières pour des raisons qui relèvent de l’accessibilité physique et pédagogique des formations, mais aussi par absence d’interlocuteur sensibilisé et formé. Gérard Lefranc, qui a, dans le cadre de la concertation nationale sur l’offre de services aux personnes et aux employeurs dirigé le groupe de travail en charge de l’accessibilité universelle des CFA répond à nos questions et évoque la politique handicap de Thales.
Dans quelle mesure le groupe Thales fait-il appel à des personnes handicapées issues de CFA ? Et pensez-vous que l’apprentissage soit une voie de recrutement possible pour tous les secteurs d’entreprises ?
Thales mène depuis plusieurs années une politique volontariste d’accueil d’alternants. En 2018 ce sont environ 2000 apprentis qui ont rejoint Thales dans tous nos secteurs d’activités. Parmi ceux-ci 2,1 % d’apprentis sont en situation de handicap : ce chiffre est supérieur à la moyenne nationale qui est aujourd’hui de l’ordre de 1%. On dénombre en France 4000 apprentis en situation de handicap. L’objectif affiché par le gouvernement est de doubler ce nombre en 3 ans avec un horizon de 6% d’apprentis en situation de handicap dans les CFA. La loi Pénicaud ouvre nettement la voie au passage d’une société des diplômes à une société des compétences, ce qui donne une dimension supérieure à l‘apprentissage.
L’apprentissage chez Thales concerne tous les métiers de l’entreprise et tous les niveaux de qualification compatibles avec les profils de Thales, avec une prédominance dans nos cœurs de métier comme les domaines techniques tels que logiciels, électronique. Mais cela couvre aussi les domaines RH, Communication, achats, logistique, finance, paie, assistanats… Les apprentis sont issus des différentes voies de formation que sont les IUT, les écoles d’ingénieurs mais aussi des CFA classiques.
À quels obstacles fait-on face dans l’accès à l’apprentissage des personnes handicapées ? Les CFA sont-ils véritablement ouverts à l’accueil de personnes en situation de handicap ?
Il y a une volonté générale pour affirmer que l’apprentissage concerne ou doit concerner les personnes handicapées et que c’est pour elles une voie à privilégier. Toutefois on note que peu de jeunes en situation de handicap entrent en apprentissage : peu d’entre eux ont connaissance que les CFA accueillent des personnes handicapées. Les CFA par ailleurs ont des difficultés à mesurer et à définir en quoi consiste le fait d’accueillir des personnes handicapées. Les employeurs se désolent de ne pas trouver les candidats handicapés et ne perçoivent pas clairement ce que le CFA va attendre d’eux dans le cadre de l’apprentissage d’un jeune en situation de handicap. Il manque une véritable coordination des différents acteurs que sont les CFA, les employeurs et les apprentis. Cette coordination doit s’accompagner d’une offre de service et d’outils mobilisables afin de permettre la mise en action des différents acteurs pour assurer et sécuriser le parcours des jeunes apprentis à l’issue de leur formation. Il est en effet crucial d’appréhender ce qui se passe pour l’apprenti après sa formation et il est du devoir du CFA de s’en préoccuper.
Dans le cadre de l’obligation d’emploi, deux mesures sont très intéressantes, la première concerne la mise en place d’un référent handicap dans chaque CFA et la deuxième concerne l’obligation d’accessibilité des CFA. Le groupe de travail (GT3), mis en place dans le cadre de l’offre de service en lien avec les modifications de l’OETH, a élaboré deux outils importants sur ces sujets en vue de créer la synergie entre les acteurs et mettre en place une démarche d’accessibilité universelle dans les CFA. Il s’agira dans un premier temps de mettre en place une démarche d’amélioration continue car il n’est évidemment pas possible de parvenir à l’accessibilité totale, physique et pédagogique immédiatement pour tous les CFA.
Ces travaux sont issus des meilleures pratiques mises en place dans différentes régions, les outils sont disponibles sur le site du Ministère du Travail : l’un concerne le référentiel d’accessibilité du CFA et l’autre les missions et activités du référent handicap en CFA. Une fois que ces mesures d’accessibilité seront implémentées il faudra faire connaitre la démarche aux apprenants, aux familles, aux partenaires, et aux employeurs.
Le référentiel d’accessibilité CFA et sa grille d’évaluation :
Ce référentiel a pour but de guider le CFA à entrer dans une démarche d’amélioration continue de d’inclusion des apprentis handicapés. Cette grille de référence a été élaborée pour identifier les exigences et axes à prendre en compte par le CFA, à la fois en termes de mesures d’organisation et de management de l’accessibilité, et en termes de parcours de l’apprenti, avant, pendant et après son entrée au CFA.
Le référent handicap :
La fiche métier définit les services et missions associées du référent handicap en direction de l’apprenti et de sa famille, de l’équipe pédagogique et de l’équipe administrative du CFA, et de l’employeur. Le référent handicap devient l’interlocuteur privilégié des entreprises.
Les CFA sont ouverts à toutes ces évolutions, ils avaient toutefois besoin d’être outillés pour leur mise en œuvre. Ces mesures sont issues des meilleures pratiques des régions telles qu’Auvergne Rhône-Alpes, Centre Val-de-Loire et Nouvelle Aquitaine.
Il y a sans doute d’autres solutions, mais dans un premier temps commençons par bien utiliser ces deux premiers outils et soyons vigilants quant au rôle du référent handicap qui dépasse de fait le cadre de son CFA. Il doit animer un réseau de partenaires et aller au-devant des jeunes en situation de handicap, afin de leur démontrer toute la richesse de l’apprentissage. Cela passe par des relations étroites avec l’Éducation Nationale et l’Enseignement Supérieur.
Sur quelles pistes d’action la politique handicap de Thales peut-elle agir dans ce domaine ?
La politique handicap autour de l’apprentissage est l’une des composantes de notre politique alternance en général. Thales a les moyens d’agir dans ce domaine en travaillant sur les territoires à la diffusion du référentiel d’accessibilité. Il faut d’une part expliquer les besoins des entreprises et de l’autre faire en sorte que l’entreprise se positionne comme un partenaire à part entière du CFA dans le parcours complet de formation de l’apprenti. En effet, du CFA à l’entreprise il doit y avoir une cohérence et une continuité en termes d’accueil des apprentis en situation de handicap
À travers sa politique handicap, Thales travaille avec un vaste réseau d’entreprises et doit porter cette sensibilité à l’ensemble de ce réseau. La loi « pour choisir son évolution professionnelle » a assoupli les conditions d’accès à l’apprentissage pour les personnes handicapées, pour les employeurs une aide financière spécifique est attribuée selon conditions par l’Agefiph. Ce que peut faire Thales c’est donc informer, témoigner et intégrer dans son dispositif les parcours d’apprentissage. Mais il ne faut pas oublier que renforcer le droit commun reste prioritaire sur le sur-mesure.
En photo : Gérard Lefranc © Thales