Vous êtes marié avec un conjoint en situation de handicap, ou vous êtes vous-même handicapé et vous souhaitez divorcer ? Sachez que vous n’êtes pas seul : près de 130 000 divorces sont prononcés chaque année. Et vous y avez également droit, en respectant quelques critères. Voyons ensemble quelles sont les conditions pour divorcer d’une personne handicapée.
Sur les conseils de Maitre Brigitte Bogucki – avocate spécialiste du droit de la famille (source : AlloDocteurs)
Divorcer d’une personne handicapée ?
Oui, il est possible de divorcer d’une personne handicapée en France, comme dans le cas d’un divorce avec une personne non handicapée. Le handicap en soi n’est certainement pas un motif de divorce. Les raisons pour demander le divorce peuvent être diverses et ne dépendent pas exclusivement du handicap de l’autre conjoint.
Cependant, dans certains cas, le handicap peut influencer les modalités du divorce, notamment en ce qui concerne la garde des enfants, la pension alimentaire, ou d’autres aspects liés à la situation de handicap de l’un des conjoints.
Il est important de souligner que chaque situation est unique. Les décisions prises lors d’un divorce, y compris celles liées au handicap, dépendent de nombreux facteurs. Y compris les besoins et les intérêts de chaque partie ainsi que ceux des enfants s’il y en a. Il est donc recommandé de consulter un avocat spécialisé en droit de la famille pour obtenir des conseils adaptés à votre situation spécifique.
Quelles sont les formes légales de divorce en France ?
En France, il existe plusieurs types de divorces, chacun correspondant à des situations spécifiques.
Voici les principaux :
- Divorce par consentement mutuel : Les deux conjoints sont d’accord pour divorcer et s’entendent, à l’amiable, sur les modalités de la séparation (partage des biens, garde des enfants, pension alimentaire, etc.). Ce type de divorce peut se faire par acte d’avocat, sans passer par un juge.
- Divorce pour acceptation du principe de la rupture du mariage : Les deux conjoints acceptent le principe du divorce, mais ne sont pas d’accord sur toutes les conséquences (par exemple, la garde des enfants). Ce divorce nécessite l’intervention d’un juge.
- Divorce pour altération définitive du lien conjugal : Le couple est séparé depuis au moins deux ans, sans possibilité de reprise de la vie commune. L’un des conjoints peut alors demander le divorce pour altération définitive du lien conjugal, sans le consentement de l’autre.
- Divorce pour faute : L’un des conjoints demande le divorce en raison de fautes graves commises par l’autre (adultère, violence, abandon, etc.). Ce type de divorce peut nécessiter la preuve des fautes devant un tribunal. Le handicap ne peut pas être considéré comme une faute.
Ces différents types de divorces ont leurs propres procédures et implications légales. Consultez toujours un avocat spécialisé en droit de la famille pour obtenir des conseils personnalisés en fonction de votre situation.
En pratique, comment s’y prendre pour demander le divorce ?
Si l’une des personnes présente un handicap physique, il n’y a aucune conséquence sur la forme de la demande de divorce. Vous pouvez choisir la forme de divorce la plus adéquate avec votre situation.
Alors que dans la situation d’un handicap mental, la seule limite légale est qu’il ne peut pas y avoir de divorce par consentement mutuel. Pas de divorce par acceptation du principe du lien martial non plus.
La personne doit impérativement être sous tutelle ou curatelle. Si ce n’est pas le cas, il faut engager la démarche de mise sous tutelle avant la démarche de divorce, que l’on soit le handicapé ou l’époux. On ne peut pas engager une procédure de divorce si la personne n’est pas sous tutelle/curatelle.
Deux cas de figure pour un divorce avec une personne en situation de handicap mental :
- Si l’on n’est pas soi-même la personne en situation de handicap : engager la procédure de divorce en mettant en cause le tuteur ou curateur.
- Si l’on est soi-même la personne en situation de handicap : on est sous curatelle, on le fait soi-même avec l’aide du curateur.
Il faut savoir que sous tutelle, c’est le juge des tutelles qui accorde le divorce ou non. Celui-ci pourra prendre rendez-vous pour rencontrer la personne handicapée et connaitre la raison de son choix de divorce. Il peut aussi demander un examen médical. Il a donc le droit de refuser le divorce.
Peut-on forcer un époux en situation de handicap à divorcer ?
Même si la personne ne veut pas divorcer, que ce n’est pas dans son intérêt : OUI.
En situation de handicap ou non, OUI, on peut forcer quelqu’un à divorcer. Cependant, il faut se limiter à deux formes de divorce. Le divorce pour séparation depuis plus de deux ans ou le divorce pour faute.
Financièrement, que peut espérer la personne handicapée de ce contexte ?
Rien de spécifique au handicap (mental ou physique) n’est précisé dans la Loi. Les personnes en situation de handicap n’ont pas de droit en plus.
Par contre, la Loi prévoit des situations qui permettent à la personne handicapée d’avoir des avantages financiers. 2 articles ont été prévus à cet effet :
- Article 266 du Code civil : le principe de l’obligation de secours entre époux. Celui-ci cesse lorsque le divorce est prononcé. Néanmoins, si le divorce cause un préjudice particulier (médical…), le juge peut donner des dommages et intérêts sur cette base-là.
- Article 270 du Code civil : la prestation compensatoire. C’est une somme destinée à compenser la disparité financière que le divorce va créer entre les époux. Elle peut être adaptée. C’est une clause qui permet de demander une rente viagère. Mais seulement si on est dans l’incapacité financière de s’assumer au quotidien ou si on est dans une situation où notre santé est gravement atteinte. Attention, cette clause est valable seulement en cas de besoin financier et doit respecter l’intérêt des deux époux.
Quel est le délai pour une procédure de divorce ?
La durée d’une procédure de divorce dépendra de plusieurs critères.
Dans un premier temps, cela dépendra du type de divorce retenu. En effet, le divorce par consentement mutuel sera la procédure la plus rapide.
De plus, mieux les époux s’entendent, plus vite sera prononcé le divorce. Éviter les conflits vous fera gagner du temps.
Enfin, la rapidité peut dépendre du tribunal dont vous dépendez. Plus le tribunal a d’affaires en attente, plus ce sera long.
Le délai est donc très aléatoire d’un dossier à l’autre.
Mise à jour du 24 octobre 2024 par Handirect :
La garde des enfants et l’exercice de l’autorité parentale pour un parent handicapé
Le handicap, qu’il soit physique ou mental, ne prive pas automatiquement un parent de la garde de ses enfants après un divorce. Le principe de base est que le statut de parent ne disparaît pas avec la fin du couple conjugal. Et le handicap ne doit pas, à lui seul, être un critère de refus de la garde.
Le juge aux affaires familiales (JAF) statue en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant et examine attentivement les capacités du parent à assurer la sécurité, la santé et le bien-être de celui-ci.
Handicap mental et limitations à l’autorité parentale
Dans le cas d’un parent en situation de handicap mental, la situation est plus complexe. En se basant sur l’article 373-1 du Code civil, le juge peut considérer que ce parent n’est pas en mesure d’exercer pleinement l’autorité parentale. L’autorité parentale peut, dans ce cas, être attribuée entièrement à l’autre parent. Toutefois, ce n’est pas systématique et des mesures peuvent être prises pour maintenir un lien avec l’enfant, comme un droit de visite encadré.
Handicap physique et garde d’enfants
Un parent souffrant d’un handicap physique peut tout à fait obtenir la garde de ses enfants. Il doit cependant démontrer qu’il est en mesure de subvenir à leurs besoins quotidiens, notamment avec l’aide de dispositifs adaptés. Les magistrats tiennent compte des rapports d’enquêtes sociales et médico-psychologiques pour évaluer la capacité du parent à assurer le bien-être des enfants. Si nécessaire, des aides externes, comme une assistante maternelle ou un auxiliaire de vie, peuvent être mises en place pour pallier les limitations physiques et faciliter la garde.
Dans ce cas, il est recommandé de fournir des preuves solides de l’organisation mise en place pour répondre aux besoins des enfants. Cela peut inclure la démonstration que des ressources financières, des aides matérielles ou une assistante maternelle qualifiée sont disponibles pour assurer le quotidien des enfants (repas, bain, trajets scolaires…).
Évidemment, le degré du handicap physique ne remet pas en cause l’exercice de l’autorité parentale. Par contre, il influe parfois la décision sur la résidence de l’enfant.
Droit de visite et d’hébergement pour un parent handicapé
Même si la garde principale est accordée à l’autre parent, un parent handicapé bénéficie généralement d’un droit de visite et d’hébergement. Le juge peut ajuster ces modalités en fonction de l’état de santé du parent handicapé. Dans certains cas, si l’enfant est jeune ou que le handicap du parent le justifie, le droit de visite peut se dérouler dans un environnement sécurisé ou en présence d’une tierce personne. Le droit de visite ne peut être refusé qu’en cas de motifs graves, notamment si l’intérêt et la sécurité de l’enfant sont en jeu.
Le juge et l’intérêt de l’enfant
Dans toutes les décisions concernant la garde ou le droit de visite, le juge aux affaires familiales met en avant l’intérêt de l’enfant. Les aptitudes physiques et mentales des deux parents sont prises en compte, ainsi que leurs qualités éducatives. Un parent en situation de handicap qui parvient à prouver qu’il peut offrir un environnement stable et adapté pourra obtenir la garde, ou à défaut, un droit de visite et d’hébergement, à moins qu’un motif grave ne s’y oppose.
De plus, ces décisions ne sont pas irrévocables : si la situation évolue, chaque parent peut demander une révision des modalités de la garde ou de l’exercice de l’autorité parentale.
Divorcer d’un conjoint en situation de handicap n’est généralement pas un frein, selon votre situation bien entendu. Il est important de bien noter que vous devez continuer à remplir votre devoir de secours pendant toute la procédure de divorce. Ce devoir ne s’éteint qu’une fois le divorce prononcé.
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