Ce mois-ci, pour sa chronique britannique, Jean-Christophe Verro s’est penché sur le thème « Éducation et handicap au Royaume-Uni » en recueillant de nombreux témoignages.
En 1995, le gouvernement britannique a promulgué le Disability Discrimination Act (DDA), premier texte à traiter directement de la discrimination des personnes handicapées simultanément au sein de l’éducation, l’emploi et l’accès aux services publics. La loi établit un cadre dans lequel tous les organismes publics et les employeurs doivent garantir l’accessibilité et l’égalité des chances, aussi bien dans leurs emplois que dans leurs prestations de services.
Pour appliquer le DDA, un organisme de réglementation a été crée, la Commission des droits des personnes handicapées (Disability Rights Commission ou DRC). Conjointement, le DDA et la DRC ont fait des progrès significatifs en matière d’égalité pour les personnes handicapées, mais les améliorations ont été lentes, bien que significatives. En 2010, le DDA et la DRC ont respectivement fusionné avec une autre loi et une autre commission pour créer la loi sur l’égalité de 2010 (Equality Act 2010) et la Commission pour l’égalité et les droits de l’Homme (the Equality and Human Rights Commission ou EHRC).
Le DDA et l’Equality Act exigent tous deux des fournisseurs de biens et services, des employeurs et des professionnels de l’éducation, qu’ils entreprennent trois choses essentielles:
- Ne pas discriminer sur la base du handicap.
- Anticiper (anticipatory duty), c’est dire s’attendre à ce que les personnes handicapées veuillent faire usage de leurs biens, locaux ou services, chercher un emploi, etc.
- Faire des ajustements adaptés (reasonable adjustments) si besoin.
Éducation et handicap
Toutes les personnes handicapées ont le droit d’accéder à l’éducation au Royaume-Uni, et les écoles (et autres centres professionnels éducatifs) ont ce devoir d’anticipation et de faire des ajustements adaptés. En conséquence, le gouvernement a débloqué des fonds supplémentaires pour les professionnels et les étudiants afin de les aider à couvrir le coût des ajustements importants. Cependant le gouvernement exige en retour que les adaptations soient bel et bien réalisées et que le niveau nécessaire de soutien de base soit assuré. Ces ajustements comprennent les accès aux bâtiments et à leur environnement, l’accès à des équipements et matériels pédagogiques appropriés et adaptés… Un financement dédié supplémentaire est fourni directement aux écoles pour financer ce soutien, à l’exception de l’enseignement supérieur où les fonds sont mis à la disposition à la fois de l’Université et de l’élève. Le financement pour les élèves étant une allocation pour étudiant handicapé.
Concrètement, les enfants handicapés vont à l’école avec les autres enfants (sauf si leur état nécessite des adaptations trop importantes, comme un suivi médical permanent). Les écoles et leur environnement (cours de recréation…) doivent être accessibles et fournir les équipements adéquats (toilettes, sanitaires, etc.). Les contenus pédagogiques et matériels éducatifs doivent être adaptés si besoin.
Soutien aux personnes handicapées dans l’enseignement supérieur
Les universités ont les mêmes obligations que les autres écoles. Les élèves ont plusieurs occasions de déclarer un handicap au cours de leur inscription, ou bien ils ont le droit de ne pas le divulguer. Mais dans ce cas, l’université, ignorant ce handicap, ne peut procéder aux ajustements requis par la loi, et donc n’est pas tenu de les fournir. Les étudiants peuvent toujours déclarer leur handicap à tout moment de leur cursus, et dès qu’ils l’ont fait, l’université doit faire en sorte de satisfaire leurs besoins de compensation.
Tout financement fourni par le gouvernement pour soutenir un étudiant est limité à l’activité éducative. Les étudiants n’ont donc pas de financement de soutien par rapport à l’aspect social de leur cursus à l’université. Ce qui peut soulever des craintes concernant l’isolement et l’inégalité de l’expérience de vie universitaire de l’élève. Cependant, en tant qu’organisme public, les universités ont la responsabilité de s’assurer que toutes les activités proposées dans le cadre universitaire soient rendues accessibles, bien que les étudiants puissent trouver laborieux l’accès à certaines activités.
En termes de types de soutien à l’accessibilité pour les étudiants de l’enseignement supérieur, cela varie en fonction de l’étudiant et de son handicap. En effet, la loi indique que la majorité des ajustements raisonnables (et leur financement) doit répondre aux besoins individuels de l’élève. Quelques exemples de soutien : preneurs de notes, technologies d’assistance telles que des logiciels spécialisés, accès à un soutien personnel de tuteur spécialisés, de mentors, de conseillers d’orientation, etc.
Exemple concret: le soutien aux étudiants handicapés à l’Université de Leeds, entretien avec Simon Morris – Assistant Head of Student Support (Leeds University Disability Services)
L’Université de Leeds possède un service dédié, le “University of Leeds Disability Service”, composé de professionnels qui travaillent spécifiquement avec les élèves pour les aider à identifier et mettre en œuvre leur soutien. L’équipe comprend notamment une équipe d’assistants en soutien dédié qui fournissent toute l’assistance personnelle décrite ci-dessus.
Le service offert à Leeds est très similaire à de nombreux autres services de soutien aux personnes handicapées offerts par d’autres universités britanniques. En plus de l’équipe des services d’invalidité, l’université dispose également d’un service de santé mentale dédié aux étudiants. Le soutien apporté aux étudiants est proposé sur du long terme et répond aux étudiants qui souffrent et ont des besoins spécifiques d’accompagnement dans leurs études.
Également, le Centre d’évaluation de Leeds est un service public qui offre aux étudiants une évaluation de leurs besoins individuels dans le cadre des allocations aux étudiants handicapés.
Enfin, l’université de Leeds a un partenariat avec le RNIB (Royal National Institute of Blind People, Institut Royal pour les Aveugles), qui offre des services de transcription pour les étudiants aveugles et malvoyants, afin d’assurer une disponibilité de tous les supports pédagogiques dans des formats accessibles.
Pour anticiper la baisse des budgets gouvernementaux prévus pour les allocations handicap, l’université de Leeds a décidé d’investir dans de l’Assistive technology”, ce dont tous les étudiants, y compris s’ils ne sont pas handicapés, pourront bénéficier.