Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

ESAT et EA face au Covid-19 : Messidor s’adapte aux circonstances

ESAT et EA face au Covid-19 : Messidor s'adapte aux circonstances
Branly – Spot 2 – PC
Écouter cet article

Messidor : « Les personnes des ESAT et EA que nous accompagnons ont bien géré la situation face au Covid »

Comme la grande majorité des acteurs économiques, les ESAT et les EA (entreprises adaptées) ainsi que les associations qui les gèrent n’ont pas été épargnés face à la crise du Covid-19 et les confinements qui en ont résulté. Nous avons échangé avec Jean-Marc Collombier, directeur général de Messidor, pour savoir comment il a vécu cette situation et connaître son ressenti vis-à-vis des personnes accompagnées par son association.

Pouvez-vous présenter en quelques mots ?

J’ai 56 ans. Je suis directeur général de Messidor depuis le mois d’août 2020. J’ai travaillé au sein de Messidor depuis de nombreuses années. J’ai été responsable d’un restaurant pour Messidor il y a 28 ans. J’ai ensuite été responsable du secteur restaurant du Rhône pour Messidor, puis j’ai pris la direction du territoire de Haute-Savoie en développant les ESAT, les EA et l’emploi accompagné.
J’ai ensuite rejoint la direction générale adjointe il y a 30 mois, puis la fonction de directeur général depuis l’été 2020.

Messidor, qu’est-ce que c’est ?

Messidor est une association née en 1975. Elle s’est d’abord installée sur le département du Rhône, puis s’est développée sur la région Rhône-Alpes, avec des implantations sur l’Isère, la Drôme, l’Ardèche, la Loire et la Haute-Loire. Il y a également une antenne en Charente-Maritime.
La particularité de Messidor est de gérer des établissements de transition, quel que soit leur statut : ESAT et Entreprises Adaptées. Nous nous sommes également développés sur l’emploi accompagné. Et nous avons des projets pour développer la prise en charge hors RQTH, avec le modèle job coaching, proche de l’emploi accompagné.





Aujourd’hui Messidor compte environ 1200 personnes accompagnées par an, 230 encadrants, 20 sites, 32 millions d’euros de budget, une part d’autofinancement importante, et des secteurs d’activité que l’on veut diversifier pour offrir une palette de métiers aux personnes qu’on accueille : espaces verts, hygiène et propreté, bureautique et reprographie, les prestations d’équipe intégré en entreprise et la restauration. À ces métiers, s’ajoute l’unité de réentrainement au travail : cette unité a pour objet d’accueillir les personnes les plus en difficulté au début de leur parcours pour leur permettre de retrouver un peu d’employabilité et ensuite rejoindre nos unités de production.
Notre objectif reste d’accompagner nos différents publics dans une transition vers le milieu ordinaire.

Est-ce que Messidor accompagne uniquement des personnes en situation de handicap psychique ?

Messidor s’est vraiment construite autour du handicap psychique et c’est notre spécialité. Mais aujourd’hui on s’ouvre à d’autres types de handicap, plus particulièrement sur l’emploi accompagné, notamment l’autisme. Nous avons aussi dans l’idée d’apporter une aide peut-être à d’autres établissements pour offrir cette possibilité de transition à des personnes qui auraient d’autres typologies de handicaps.

Comment ont réagi les personnels des ESAT et EA de Messidor à l’annonce du premier confinement lié au Covid ?

Pour le premier confinement, c’était un peu particulier, car on ne s’y attendait pas vraiment. Nous avons dû nous organiser très vite et ça a été un peu la stupeur. On s’est arrêtés complètement. Il y avait énormément d’inquiétude parce que nous n’avions pas d’équipements, de protocole défini, et on partait vraiment vers l’inconnu. Mais avec le recul je dirais que nous l’avons plutôt bien géré. Et surtout, on percevait à l’époque qu’il y aurait une fin, qu’un jour ça allait s’arrêter, ce qui s’est passé au bout d’un mois et demi.





Nous avions mis en place un accompagnement renforcé des personnes handicapées des ESAT et EA pour faire face au Covid via le téléphone et la Visio. Nous prenions des nouvelles de chacun, très régulièrement, presque trop je crois. Avec le recul, on s’est dit qu’on avait peut-être un petit peu exagéré car nous avons eu des retours de personnes accompagnées nous disant : « Arrêtez de nous appeler ! ». Nous avions tellement l’inquiétude que les personnes accompagnées supportent mal cette situation, cet isolement, que nous avons peut-être sur-réagi. Bien sûr nous avons réajusté après, au fur et à mesure, en nous adaptons vraiment à chaque personne.
On s’est rendu compte que finalement, l’isolement était quelque chose dont ils avaient l’habitude pour une grande partie d’entre eux. Peut-être que cela fait partie de la vie du fait de leur handicap psychique. Ils se sont souvent retrouvés isolés à certains moments de leur vie, soit parce qu’ils n’avaient plus d’activité, soit parce qu’ils étaient hospitalisés…
Il y a toujours eu une ou deux situations, mais c’était vraiment très marginal.
C’était donc une surprise, mais nous avons donc constaté qu’ils arrivaient mieux à gérer la situation que ce que nous pensions.

Après cela, nous avons repris avec une bonne remontée en charge. Les salariés ont très bien réagi et bien accompagné la reprise. Tout le monde était vraiment investi. Nous avons pu redéployer nos activités très rapidement. Ensuite, il y a eu la reprise, une forme de normalité qui est revenue.
Même si le confinement a présenté des difficultés, dans sa gestion, on avait une perspective.

Et pour le second confinement ?

C’est une situation assez différente. Nous avons l’expérience du premier confinement. Nous avons tout l’équipement nécessaire, les protocoles, on sait gérer. C’est pourquoi nous avons maintenu l’essentiel de nos activités lors du deuxième confinement, sauf bien sûr la restauration en service en direct, puisque les restaurants sont fermés, mais lorsque c’est possible nous essayons de réaffecter ces personnes à d’autres secteurs en attendant. Nous avons quelques entreprises qui se sont mises à l’arrêt, mais cela reste rare.
De plus, il y a tout de même certaines personnes qui ont cessé de travailler, mais ce n’est pas forcément lié à leur handicap psychique, plutôt à d’autres pathologies qui font qu’elles peuvent être personnes à risque, auquel cas on doit prendre des mesures pour les protéger. Pour ces personnes, nous maintenons un accompagnement à distance. Les coordinateurs parcours d’insertion les appellent régulièrement pour faire le point, en fonction du rythme qu’ils souhaitent.

La principale difficulté du second confinement vient donc surtout de l’incertitude concernant l’avenir. On est engagés dans une course de fond et cela cause une sorte d’usure qui existait moins la première fois. Mais peut-être que l’inquiétude des encadrants est plus forte que celle des personnes accompagnées, je ne sais pas.

Est-ce que vous évoquez cette incertitude avec les personnes accompagnées ?

C’est un sujet qui est permanent étant donné que des protocoles sont mis en place sur tous les sites, sur toutes les activités, pour éviter que les équipes se croisent, que des personnes mangent ensemble… et cela complexifie profondément l’organisation du travail.

Mais notre rôle est aussi de rassurer. Et je pense que si l’on applique bien les gestes barrières, le port du masque, le lavage des mains… cela rassure l’ensemble des salariés et c’est aussi une condition de sécurité indispensable pour pouvoir maintenir le travail. À ce jour nous n’avons pas eu de clusters et nous souhaitons que ça continue. Nous avons eu quelques cas contacts, et quelques personnes touchées par le Covid, mais sans que cela se développe à l’intérieur d’un site. Par précaution, nous avons tout de même interrompu les formations lors du deuxième confinement, car elles ont lieu en présentiel et réunissent dans un même lieu des personnes de différents secteurs d’activité, voire de différents sites, ce qui nous semblait potentiellement risqué.

Après, tout le monde n’est pas égal dans la gestion de cette situation. À nous de savoir bien identifier les différents profils et les difficultés pour apporter une réponse adaptée.

Justement, savez-vous comment les personnes accompagnées dans vos ESAT et EA vivent cette période et font face au Covid ?

Je crois que c’est très différent d’une personne à l’autre. Pour certains, ce n’est pas d’une grande gravité, parce qu’ils ont dû affronter auparavant une maladie ou des problèmes tellement importants, que finalement ils traversent cette période assez simplement.
Mais pour d’autres, cela ajoute de l’angoisse, de l’anxiété, et des grandes difficultés.
Concernant le confinement en tant que tel, nous avons constaté lors du premier confinement que quand la majeure partie de nos salariés ne travaillaient pas, certains le vivaient mal. Au bout de 15 jours, certaines personnes nous ont contactés en nous disant : « Ça fait 15 jours, ça suffit, est-ce qu’on peut revenir ? ». On a même une personne qui est venu sur un site pour rencontrer le directeur et demander à retravailler car cela devenait intenable pour elle. Elle a pu rejoindre la seule équipe qui travaillait encore. Cette personne avait conscience que le travail le stabilisait, lui donnait un rythme, c’était un réel besoin.

Et puis Messidor, c’est la relation à l’autre, l’accompagnement, donc quand on doit arrêter avec chacun chez soi, cela change tout. Le télétravail a des avantages dans la période que l’on traverse, mais dans nos établissements il garde une place marginale sur le long terme.

Quel bilan faîtes-vous aujourd’hui ?

Je me dis que pour le moment on ne s’est pas trop mal débrouillé. L’essentiel a tenu. Nous avons même réussi à faire des insertions cette année : malgré le fait qu’il a fallu faire face au Covid 30 personnes ont été placées à partir de l’ESAT et de l’EA, ce qui est très positif pour nous. Au niveau de l’emploi accompagné, nous avons signé environ 150 contrats, de janvier à fin octobre sur l’ensemble du périmètre.
Il faut aussi noter que sur cette période particulière, il y a de la résilience, chez les encadrants et chez les personnes que l’on accompagne. La capacité de rebond existe. Ce n’est pas facile à gérer et ils sont présents même si l’atmosphère est particulière.

Toutefois, c’est un peu long, pour les personnes qu’on accompagne, et pour les encadrants. Il a fallu s’adapter en permanence, avec souvent de nouvelles directives, des ordres et contre-ordres.
Le fait de ne pas avoir de perspective claire, ça pèse, mais c’est comme pour les autres français.
Et puis je pense aussi que chacun, à côté de son travail, est inquiet pour ses proches, leur santé mais aussi leur avenir, leur métier… on ressent une ambiance plus morose qu’au sortir du premier confinement où tout le monde considérait que c’était fini.

Souhaitez-vous ajouter quelque chose ?

Début 2020, nous avons lancé le projet associatif sur Messidor 2025 avec un plan d’actions qui comprend énormément d’aspects. Et malgré le confinement en mars, nous avons essayé de maintenir le cap et de ne pas interrompre ce qui était mis en route.

Ainsi, nous avons des projets relatifs à la participation des personnes accompagnées : le projet d’établissement des ESAT est écrit avec elles, ce qui est une nouveauté, elles participent à l’écriture.
Dans le même sens, nous souhaitons travailler sur la participation dans le fonctionnement quotidien.
Nous avons également dans l’idée de développer des plateformes d’insertion, pour ouvrir Messidor à d’autres fragilités et soutenir d’autres établissements.
De plus, nous avons toujours la volonté de développer l’essaimage de notre franchise sociale, le modèle Messidor, sur des départements où l’on n’est pas encore implantés. Dans cette optique, nous avons démarré une franchise à Bordeaux et nous venons de signer avec un établissement dans les Pyrénées.

D’autre part, nous avons aussi des projets qui visent à nous rapprocher des entreprises, notamment des entreprises du milieu ordinaire. Nous venons de démarrer un lab entreprise « le lab inclusion », qui a vocation à réunir des chefs d’entreprises, de grands groupes, de PME… pour leur demander ce qui leur pose problème dans l’intégration des personnes handicapées, et ce qu’il faudrait faire si rien n’existait… ce qu’il faudrait mettre en place pour les aider.
En parallèle, nous essayons également de proposer des services aux entreprises pour sécuriser les parcours : nous développons actuellement « Messidor conseil » piloté par le « Cent 7 ». Il s’agit d’un service dédié à accompagner les entreprises dans la formation de leurs professionnels, la sensibilisation, le maintien en emploi… cela devrait démarrer en ce début d’année 2021.

Pour plus d’infos sur Messidor : https://www.messidor.asso.fr/

En photo : ESAT et EA face au Covid. Jean-Marc Collombier, directeur général de Messidor.

Ces articles pourront vous intéresser :

Agefiph – seeph – ordinateur

Facebook
Twitter
LinkedIn
E-mail

Commentaires

Inscrivez-vous à nos Newsletters

AURA – forum – PC – Spot 4

Mag – ordinateur – permanent

Flash Info