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L’Agefiph répond aux rapports IGAS et Cour des comptes

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L’AGEFIPH répond à ses détracteurs suite aux deux rapports publiés successivement par la Cour des Comptes et l’IGAS

Sérieusement secoués par deux rapports en début d’année, l’un de la Cour des Comptes et l’autre de l’Inspection Générale des Affaires Sociales (IGAS) associée à l’Inspection Générale des Finances (IGF), l’AGEFIPH et le FIPHFP devraient, selon ces rapports, se remettre en question et même s’inquiéter pour leur avenir. Anne Baltazar, présidente actuelle de l’Agefiph répond aux critiques comme aux propositions.

La Cour des comptes fait des remarques sur la gestion de l’Agefiph qu’elle qualifie de coûteuse et mal maîtrisée. Comment l’Agefiph répond à cela ?
L’Agefiph est un acteur des politiques publiques. C’est totalement légitime que nous soyons soumis à des contrôles. Ce rapport est la conclusion d’investigations conduites en 2016, sur l’exercice 2012-2015. C’est important de noter que depuis, la situation a évolué.

Sur le plan général, l’Agefiph souscrit aux recommandations formulées la concernant, la plupart trouvent d’ailleurs un écho très direct dans son plan stratégique.  Ce dernier a posé les bases d’une démarche de transformation qui vise, entre autres, à centrer l’action de l’Agefiph sur les besoins des personnes handicapées et des entreprises.

Ce plan stratégique traduit aussi la volonté de l’Agefiph d’inscrire pleinement son intervention en appui et en complémentarité des dispositifs de droit commun. L’Agefiph est un acteur incontournable en matière de politiques publiques de l’emploi en matière de handicap. Elle s’attache à faire converger ses actions, partenariats et outils rénovés autour d’enjeux forts : permettre des parcours professionnels des personnes handicapées sécurisés (par exemple en renforçant leur accès à la formation de droit commun) ; renforcer et fédérer les acteurs économiques et sociaux, et agir sur le système d’acteurs de l’emploi, de la formation, de l’orientation et du travail, le tout pour permettre aux personnes handicapées d’accéder à l’emploi, sans discrimination.





Elle ajoute que la collecte des fonds est mal maitrisée, quel est le fond du problème ?
Elle pointe essentiellement du doigt la complexité de l’Obligation d’emploi des travailleurs handicapées, et la déclaration qui lui est associée. Ce mécanisme est défini par le législateur, l’Agefiph applique ici le cadre réglementaire. Une réflexion est en cours pour intégrer la Déclaration de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés (DOETH) à la Déclaration sociale nominative (DSN). L’objectif est, notamment, de contribuer à simplifier les démarches pour les entreprises.

La Cour des Comptes vous reproche de n’avoir qu’un rôle de financeur, comment l’Agefiph répond à cette critique ?
C’est effectivement un cliché qui caricature un peu la réalité du travail réalisé par les collaborateurs de l’Agefiph. Il suffit de consulter toutes les composantes de l’offre d’intervention de l’Agefiph, pour constater que la spécificité du soutien qu’elle apporte au développement de l’emploi des personnes handicapées ne saurait l’assimiler à un simple financeur.
Financer un dispositif, un service ou une action n’est qu’une dimension d’un processus dans lequel l’Agefiph intervient en réalité dès le stade de la conception jusqu’au niveau du suivi, de la mise en œuvre, de l’évaluation, voire du contrôle.
Par ailleurs, l’Agefiph délivre directement des pans entiers de ses aides et prescriptions : c’est par exemple le cas de l’accompagnement délivré aux entreprises. Prestations qui seront ces prochaines semaines étoffées afin notamment de proposer un soutien plus personnalisé en matière d’emploi de personnes en situation de handicap, un appui au dialogue social.

De même, l’Agefiph assure la gestion directe de dispositifs transférés par l’Etat. C’est le cas du dispositif de Reconnaissance de lourdeur du handicap (RLH) et de la Déclaration d’obligation d’emploi de travailleurs handicapés (DOETH) par les employeurs. Notons que ces transferts se sont opérés sans moyens afférents et dans des conditions délicates.





Enfin, dernier exemple, il convient de souligner la mission essentielle de pilotage, d’animation des prestataires, opérateurs et partenaires, avec lesquels l’Agefiph conventionne et met ainsi à disposition des acteurs du service public de l’emploi des services et expertises compétentes et financées.

Plus globalement, l’implication institutionnelle de l’Agefiph au niveau national comme régional dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques de l’emploi, qu’elles soient générales ou spécifiques – en témoigne encore récemment, par exemple, l’engagement de l’Agefiph, aux côtés de l’Etat et du FIPHFP, dans le déploiement d’une nouvelle offre en matière d’emplois accompagnés suite à de nombreuses expérimentations que nous avons soutenues ; le tout dans le cadre d’une organisation déconcentrée adaptée aussi bien à la territorialisation des politiques publiques de l’emploi et de la formation professionnelle qu’à une nécessaire proximité avec ses bénéficiaires et opérateurs.

Les acteurs économiques, associatifs et institutionnels qui nous connaissent bien, savent que notre mission est plus large que celle du financement. Mais nous avons sans doute à montrer davantage ce que nous faisons réellement en termes d’ingénierie de l’emploi des personnes handicapées. La présentation, d’ici quelques semaines, de nos nouvelles aides ira dans ce sens.

La Cour des Comptes affirme que votre expertise, dans votre domaine de prédilection, est incertaine et que vous ne faites preuve d’aucune créativité, comment l’Agefiph répond à cela ?
Que je voudrais disposer de l’unité de mesure de l’expertise et de la créativité ! Plus sérieusement, nous entendons les remarques de la Cour et les recevons comme des encouragements à progresser davantage. L’Agefiph a toujours été force de proposition en matière d’ingénierie de l’emploi des personnes handicapées. Par exemple, nous avons activement contribué à rendre possible l’expérimentation autour de l’emploi accompagné. Mesure qui est aujourd’hui inscrite dans la loi. Notre plan stratégique donne une large place au développement de l’innovation, des expérimentations et à la mise en place d’une démarche prospective. Ce n’est pas un sujet nouveau pour l’Agefiph, des financements sont accessibles, une partie de la gouvernance travaille sur ce sujet… Mais peut-être ne l’avons-nous pas assez démontré ou expliqué comme nous l’avons, par exemple, fait en octobre 2017 lors de l’événement anniversaire de la loi de 1987 ?

Comment ce rapport a-t-il été perçu au sein de l’Agefiph, alors même que vous avez entrepris un renouvellement stratégique il y a un an ?
Pour être honnête, la publication du référé début 2018 nous a surpris, et il faut bien le reconnaître, nous nous serions bien passé du traitement médiatique qui lui a été réservé. Le référé s’adressait aux pouvoirs publics, nous n’avons pas eu la possibilité d’y répondre directement. L’exercice est donc un peu frustrant.

Le rapport de la mission IGAS-IGF sur le modèle économique de l’insertion professionnel des personnes handicapées, est quant à lui riche d’enseignements et il ouvre des perspectives, notamment sur le plan de la simplification de l’OETH qui ont retenu toute notre attention.

Le rapport IGAS IGF quant à lui est plutôt analytique, il suggère de revoir des choses sur les dépenses, sur les calculs du montant des contributions avec entre autres l’idée d’ajouter une taxe complémentaire. Tout cela se décline en 21 propositions. Quelles sont celles qui vous semblent prioritaires, puis les plus pertinentes, et celles qui vous sembleraient les plus efficaces ? Sachant qu’elles abordent toutes des aspects différents du modèle Agefiph/FIPHFP sans toutefois remettre en questions les 6%.
L’Agefiph répond que les préconisations de la mission IGF-IGAS sont une base de réflexion. Chaque piste proposée a ses avantages et ses inconvénients. Agir pour le développement de l’emploi des personnes handicapées suppose de pourvoir activer plusieurs leviers comme celui de la formation, initiale et professionnelle, de coordonner les acteurs de la santé au travail, de l’emploi, du développement économique, de la recherche… L’Agefiph participe aux groupes de travail qui réfléchissent à la façon d’aller plus loin et de créer une société où le handicap ne sera réellement plus un frein à l’embauche. Nous participerons par exemple à construire les simulations qui permettront aux pouvoirs publics et aux partenaires impliqués dans la concertation de privilégier un scénario plutôt qu’un autre.
Plusieurs rapports, conduits par des députés ou des sénateurs sont également en cours et l’Agefiph se rend à toutes les auditions où elle est sollicitée. Nous sommes dans une démarche constructive pour accompagner et améliorer la politique d’emploi des personnes handicapées en France. C’était déjà l’objectif de notre plan stratégique, adopté à l’unanimité des organisations syndicales, patronales et associatives qui siègent au conseil d’administration de l’Agefiph.

Les propositions 22 et 23 avancent des scénarios pour le moins radicaux, lequel vous semble le plus pertinent ?
Toutes les propositions contribuent à la réflexion et elles pourront être discutées dans le cadre de la concertation ouverte par les pouvoir publics. L’Agefiph pourra apporter son expertise et contribuer à mesurer les impacts et conséquences des différentes propositions qui pourraient être explorées.

En proposez-vous un autre et si oui lequel ?
L’Agefiph travaille, de manière continue, à l’amélioration de son action. Pour cela elle dialogue avec les acteurs de l’emploi et du handicap. Le plan stratégique de l’Agefiph prévoit d’ailleurs de renforcer le process d’évaluation et d’ajustement en continu de notre offre d’aides et de prestations. La gouvernance, réunie le 13 février dernier, a souhaité que l’Agefiph prenne pleinement sa place dans la concertation qui s’est engagée. Nous pensons que les modalités de gouvernance de l’Agefiph doivent être préservées. Le paritarisme élargi aux associations permet d’enrichir les actions de l’Agefiph grâce à l’implication de l’ensemble des parties prenantes. C’est une modalité presque unique en France, elle est à l’image de la réalité de ce qui se passe sur le terrain, dans les entreprises, où chaque situation appelle du dialogue, de la créativité et le plus souvent, le simple bon sens.

Si cette grande réforme a lieu, sur quelle période pourrait-elle s’étendre ?
Il y a une volonté de tous les partenaires impliqués d’avancer rapidement mais aussi sereinement. Il faut parfois savoir prendre le temps. Signalons que le système issu des lois de 1987 et 2005 n’est pas remis en cause par la mission IGF-IGAS. Il y est même proposé des pistes pour le conforter par des moyens financiers supplémentaires.

Les bénéficiaires vont-ils vers une période moins favorable en termes d’accompagnement ?
Il n’y a aucune raison de le penser. L’Agefiph poursuit son action, et je suis convaincue que les projets construits dans le cadre de son plan stratégique vont, au contraire, améliorer l’accompagnement des personnes handicapées en recherche d’emploi ou de maintien dans l’emploi. Par exemple, la refonte du système d’aides financières au printemps de cette année, permettra à une personne d’être soutenue dès que les démarches de Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) sera entamée. Cela permettra à l’ensemble des acteurs de mobiliser les dispositifs plus rapidement, et de limiter la durée des ruptures de parcours. C’est important.

Les partenaires de l’Agefiph doivent-il s’attendre à devoir se remettre en question ?
Avec le plan stratégique, la gouvernance de l’Agefiph a déjà mis en œuvre une réflexion profonde et ambitieuse. Elle a permis de mettre en mouvement notre institution rapidement. Nous comptons bien emmener avec nous nos partenaires. Je suis confiante, car je sais que tous nous avons conscience de l’importance de notre mission pour les personnes et pour la société toute entière.

Le réseau Chéops ne semble pas remis en question dans le rapport, est-il considéré comme sacralisé ?
Ça n’était pas l’objet du rapport, d’autant qu’une précédente mission Igas s’était consacrée à l’analyse des actions portées par le réseau Cap emploi. Le rapport a été mis en ligne ces jours-ci.

Le modèle des accords d’entreprises pourrait-il être remis en question ?
Le dispositif d’agrément des accords Handicap est effectivement questionné mais à ce stade, je pense qu’aucune hypothèse n’est plus avancée qu’une autre.

Le modèle de l’Agefiph dans sa philosophie et dans son fonctionnement touche-t-il à sa fin ?
La lecture du rapport Igas, légitime au contraire les interventions spécifiques de compensation et d’incitation, qui sont celles de l’Agefiph.
Le rapport affirme aussi que l’instauration d’un dispositif d’obligation d’emploi, assorti d’une contribution financière lorsque cet objectif n’est pas atteint, est un mécanisme qui a largement contribué à améliorer l’insertion et le maintien des personnes handicapées dans l’emploi.
Donc, non, je ne crois pas que le système, et l’organisme qui le porte et l’anime, touche à sa fin. Je pense au contraire que nous parvenons à nos fins, celles que nous nous étions fixées avec le vote, en 2017 du plan stratégique et des ambitions qu’il porte.

En photo : Anne Baltazar, présidente de l’Agefiph répond suite aux rapports de la Cour des comptes et de l’IGAS.

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