Cet article est proposé par Aline Duret, autrice, malvoyante et militante d’un livre accessible à tous.
L’accès à la lecture est un droit fondamental, pourtant de nombreuses personnes rencontrent des obstacles en raison de leur handicap. Que l’on soit malvoyant, dyslexique, atteint de troubles cognitifs ou simplement sujet à une fatigue visuelle, le livre doit rester accessible à tous.
En France, près d’un million et demi de malvoyants font face à ces défis. En tant que professeure de français dans un lycée de la couronne nantaise et romancière, je me bats chaque jour pour cette cause, éclairée par ma propre expérience. Je suis atteinte d’une maladie dégénérative congénitale orpheline qui affecte ma vision. Aujourd’hui, il ne me reste plus que 1/10 de vision avec correction. Malgré les défis, je suis déterminée à poursuivre mes rêves et à militer pour une meilleure accessibilité à la lecture.
Un constat alarmant
De nombreuses personnes se heurtent à un mur lorsqu’il s’agit de lire. Les livres au format traditionnel ne répondent souvent pas aux besoins des lecteurs en situation de handicap visuel.
Malgré les progrès technologiques avec les livres audio et les liseuses, ces alternatives ne remplacent pas la sensation unique de tenir un livre entre ses mains. Je dis souvent que la lecture, c’est un peu comme partir en vacances : il existe de nombreux moyens de se rendre à destination — vélo, cheval, train, avion, voiture — mais chacun de ces moyens offre une expérience de lecture unique. La lecture papier offre une connexion tangible à l’œuvre, une expérience sensorielle qui ne peut être reproduite par un écran ou une voix de synthèse.
Voir aussi :
70 000 livres audio accessibles par l’association Valentin Haüy.
Des solutions concrètes
Il est temps de sensibiliser les professionnels du livre à la nécessité d’offrir des ouvrages en grand caractère. Ce type d’édition, bien que parfois considéré comme marginal, est essentiel pour de nombreux lecteurs. Voici quelques propositions concrètes :
Édition en grand format :
Les maisons d’édition devraient inclure des livres en grand caractère dans leur catalogue. Ce n’est pas une solution coûteuse, mais plutôt un choix éclairé qui pourrait faire une différence majeure pour les lecteurs malvoyants qui ont bien souvent renoncer à se rendre dans les librairies.
Mon éditeur, éditions du Palémon, basé à Quimper s’est montré sensible à cette problématique. Mon dernier, L’Écho du silence, à l’image de mes trois précédentes intrigues à suspense est décliné en format grands caractères. Ce roman vous plonge au cœur de la cité médiévale de Guérande, en compagnie du détective Hadrien Velganni et de la sulfureuse écossaise, Cassidy Higgins. J’écris des romans qui mettent en scène des gendarmes, profession que j’aurais aimé exercer si je n’avais pas été déficiente visuelle.
Formation des professionnels :
Organiser des ateliers et des formations pour les éditeurs, libraires et bibliothécaires afin de leur faire comprendre l’importance de l’accessibilité dans le secteur du livre.
Partenariats avec des associations :
Collaborer avec des associations de personnes handicapées pour mieux cerner les besoins spécifiques des lecteurs et adapter les offres en conséquence.
Sensibilisation du grand public :
Utiliser les réseaux sociaux et d’autres plateformes pour informer le public des défis rencontrés par les lecteurs en situation de handicap, tout en montrant l’importance de soutenir les éditions accessibles.
Inclusion dans les bibliothèques :
Encourager les bibliothèques à constituer des sections dédiées aux livres en grand format, afin de rendre ces ouvrages facilement accessibles. Sans oublier de mettre du matériel basse vision à disposition.
Baisse de la TVA :
Plaider pour une baisse de la TVA sur les livres en grand caractère afin de les rendre plus abordables pour tous. Une telle mesure pourrait avoir un impact significatif sur la disponibilité de ces ouvrages. Aide financière pour les plus défavorisés : Proposer l’idée d’un chèque d’aide à l’acquisition de livres en grand format pour les personnes les plus défavorisées. Cela permettrait à ceux qui en ont le plus besoin de bénéficier de la lecture sans contrainte financière.
Aides techniques à la lecture :
Promouvoir des aides techniques telles que les téléagrandisseurs et les lunettes loupe avec lumière intégrée, qui peuvent grandement améliorer l’expérience de lecture. J’ai personnellement testé les lunettes eSight 4, qui offrent une solution innovante pour les malvoyants. Bien qu’elles soient encore très onéreuses, j’attends avec impatience qu’elles deviennent moins chères et plus miniaturisées, afin qu’elles puissent être facilement transportées.
Une responsabilité collective
Nous avons tous un rôle à jouer dans cette démarche. En tant qu’enseignants, parents, amis ou lecteurs, nous pouvons soutenir les initiatives qui favorisent l’accès à la lecture. Parler de ces enjeux dans les salons littéraires, sur les réseaux sociaux ou dans les cercles de discussion peut contribuer à sensibiliser un plus large public. L’accessibilité à la lecture n’est pas qu’un simple souhait ; c’est un droit à la culture que nous devons défendre.
Chaque livre qui circulera, chaque lecteur qui découvrira une œuvre, sera une victoire pour tous ceux qui, malgré leurs difficultés, désirent plonger dans un univers littéraire. Il est donc impératif que le secteur du livre prenne enfin conscience de ses responsabilités.
Le chemin est encore long, mais en unissant nos voix, nous pouvons construire un avenir où chaque lecteur, quel que soit son handicap, pourra accéder à la lecture et profiter de ses merveilles.
Pour suivre mes travaux et mes réflexions sur cette thématique, vous pouvez consulter mon site www.alineduret.fr ou me suivre sur mes réseaux sociaux Facebook & Instagram , YouTube: AlineDuretAuteure.
Je vous invite également à découvrir mes romans, déclinés en format grands caractères, qui portent un message d’espoir et d’inclusion pour tous les lecteurs. Belles lectures à tous!