L’Observatoire national sur la formation, la recherche et l’innovation sur le handicap (ONFRIH) a été institué par la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées afin d’améliorer la prise en compte des questions relatives au handicap dans les politiques et programmes de recherche, de formation et de prévention. La mission de l’ONFRIH est de réaliser un état des lieux précis de la situation existante sur ces sujets et de formuler des préconisations qui ont vocation à être prises en compte dans les programmations et actions des opérateurs concernés.
L’Observatoire a été conçu comme un lieu d’échanges et de dialogue. La composition de son Conseil d’orientation permet d’unir les compétences et les expériences d’acteurs divers et majeurs du monde du handicap : associations, personnalités qualifiées, organismes et administrations. Les travaux sont
menés par trois groupes de travail constitués au sein de ce conseil : recherche et innovation, formation, prévention. Le délégué interministériel aux personnes handicapées est le secrétaire général de l’Observatoire et en assure le fonctionnement.
L’Observatoire établit un rapport triennal ainsi que des rapports d’étape annuels. Ces rapports sont remis au ministre chargé des personnes handicapées et transmis aux autres ministres concernés ainsi qu’au conseil scientifique de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et au Conseil national consultatif des personnes handicapées.
L’Observatoire, installé en avril 2007, a élaboré un programme de travail triennal pour le champ de chacun des groupes. De plus, l’Observatoire traite de thèmes transversaux sur lesquels les trois groupes cherchent à apporter leur éclairage. Les travaux menés au cours de l’année 2008 font l’objet du premier rapport de l’ONFRIH, terminé en mars 2009. Ils portent sur la recherche en sciences humaines et sociales sur le handicap, la formation des professionnels sur le handicap, la prévention des situations de handicap chez l’enfant. Le thème transversal retenu est celui de l’emploi des personnes handicapées ; il a été abordé en 2008 sous l’angle de la recherche. Les objectifs que visent les préconisations formulées par le Conseil d’orientation de l’ONFRIH et les constats sur lesquels elles s’appuient sont résumés ci-après, domaine par domaine.
Handicap et recherche en sciences humaines et sociales
L’état des lieux de la recherche française en sciences humaines et sociales sur le handicap fait apparaître des évolutions positives mais une situation encore très insatisfaisante. Depuis une dizaine d’années, la recherche sur le handicap s’est sensiblement développée en France, y compris en sciences humaines et sociales. L’enquête « Handicaps-incapacités-dépendance », réalisée par l’INSEE sur la période 1998-2000, a fourni une base de données très riche aux milieux de recherche. De nouveaux acteurs institutionnels, notamment la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), jouent un rôle actif dans la promotion de la recherche sur le handicap. En ce qui concerne les organismes de recherche eux-mêmes, des observations convergentes suggèrent qu’un milieu de recherche sur le handicap est en émergence.
Cependant, la recherche sur le handicap, notamment en sciences de l’homme et de la société, n’est pas à la hauteur des enjeux. Outre les défis sociétaux que posent les évolutions épidémiologiques et démographiques, la loi du 11 février 2005, véritable loi de société, impose le handicap comme une question sociale, sociétale et politique de premier plan. Face à ces enjeux, un premier constat unanime est que la recherche existante sur le handicap souffre d’un manque de visibilité. Au-delà de ce constat, l’analyse montre que la recherche sur le handicap reste insuffisante et émiettée. Dans le domaine des sciences sociales, le retard est patent par rapport aux pays anglo-saxons et scandinaves où a émergé une discipline nouvelle : les « disability studies ».
Ces insuffisances s’observent à plusieurs niveaux du processus de production scientifique. Le premier niveau est celui de la fixation des priorités nationales de recherche : malgré les enjeux, le thème du handicap en est absent. Le second niveau du processus est celui de la programmation : dans le domaine du handicap, les actions incitatives sont à la fois éparses et ponctuelles. Le troisième niveau correspond aux dispositifs de recherche eux-mêmes : les milieux de recherche travaillant en sciences humaines et sociales sur le handicap comptent un faible nombre de chercheurs et sont cloisonnés et émiettés. Cette faiblesse se manifeste in fine dans les publications scientifiques sur le handicap, dont la production est bien inférieure à la fois à celle relevant d’autres domaines transdisciplinaires en France et à celle de beaucoup d’autres pays sur le handicap.
Face à ce constat, la préconisation d’ensemble est claire : il faut élever le handicap au rang de champ scientifique d’intérêt majeur et proportionner les moyens de la recherche à l’ampleur des enjeux de société. Pour réaliser ce défi, quatre objectifs doivent être poursuivis. Pour les atteindre, l’Observatoire formule seize recommandations.
En premier, il convient d’inscrire le handicap comme priorité thématique dans la stratégie nationale de recherche et d’innovation. Il s’agit en quelque sorte d’arrimer une politique scientifique nationale et volontariste à la loi du 11 février 2005. Une stratégie d’ensemble, pérenne et visible, étant ainsi affichée, le second objectif est de mettre en place les moyens pour créer une forte mobilisation, organisationnelle et intellectuelle, de chercheurs d’horizons divers. L’installation d’une plate-forme nationale, légère mais pérenne, fédérant les financeurs et jouant le rôle de support d’impulsion et de coordination, apparaît nécessaire.Dans le même esprit, il importe de favoriser l’émergence de quelques laboratoires transdisciplinaires dédiés au handicap.
Le troisième objectif est lié à la nature même du handicap : il convient d’une part de transposer les expériences des personnes handicapées, de leurs familles, des professionnels concernés en questions pour la recherche, d’autre part de traduire les connaissances produites par la recherche en réponses aux
besoins de toutes ces personnes. Ceci passe par un rapprochement entre la communauté scientifique et la société sur ce sujet.
Enfin, puisque l’on est dans le champ des connaissances, le dernier objectif est de développer des bases de données qui seront soumises à l’interprétation par les sciences sociales. Ainsi, l’exploitation de cohortes et les comparaisons internationales sont à promouvoir.
Handicap et formation des professionnels
Dans le domaine du handicap, le paysage actuel de la formation des professionnels est complexe, protéiforme et évolutif. La formation est susceptible de concerner de multiples acteurs dans une pluralité de domaines. De plus, sur ce sujet, il y a cumul des problèmes d’équilibre et de complémentarité que posent les différentes modalités de la formation : formation généraliste transversale – formation spécifique, formation initiale – formation professionnelle continue, formation de base – formation supérieure, formation théorique – formation pratique. Le groupe « formation » de l’ONFRIH a entrepris de réaliser une photographie de cette offre de formation. En 2008, l’état des lieux a porté principalement sur la formation des travailleurs sociaux et sur celle des enseignants et autres intervenants du monde de l’éducation.
La réflexion sur ce constat a conduit l’Observatoire à exprimer quatre objectifs, déclinés chacun en un certain nombre de préconisations. Une première priorité pour la formation est d’agir sur les représentations que les professionnels, comme le grand public, ont des personnes handicapées et qui font obstacle à la rencontre avec ces
personnes.
Le second objectif provient du constat du cloisonnement nuisible existant entre les formations des différentes professions. Il apparaît indispensable de recentrer les formations des professionnels sur un socle commun, garant d’une culture partagée, en phase avec les objectifs de la loi et permettant le développement d’un véritable travail interprofessionnel.
Le troisième objectif est de faire évoluer les formations existantes. Sur le fond, à l’exemple de l’Education nationale qui commence à adopter la notion d’ « élèves à besoins éducatifs particuliers », la démarche de formation des professionnels, quels qu’ils soient, devrait s’appuyer sur l’écoute des « besoins particuliers des personnes en situation de handicap ». Il paraît important de retenir, dans tous les domaines professionnels, un principe d’obligation de formation initiale s’appuyant sur cette démarche.
Le quatrième objectif est d’appuyer la formation sur la recherche, beaucoup plus que ce n’est fait actuellement : l’émiettement et le manque de visibilité de la recherche sur le handicap font que, en ce domaine, les avancées de la recherche ne se répercutent pas sur la formation.
Prévention des situations de handicap chez l’enfant
Sur le plan conceptel, l’Organisation Mondiale de la Santé a posé des définitions de la prévention qui font référence. La prévention primaire est l’ensemble des actes visant à empêcher ou réduire l’apparition des maladies ; elle se situe en amont et agit essentiellement sur les facteurs de risques. La prévention secondaire est l’ensemble des actes visant à détecter et traiter de manière précoce une maladie afin d’en diminuer la durée et la gravité ; elle passe par une chaîne repérage – dépistage – diagnostic – prise en charge, qui se situe dans le registre médical ou médico-social. La prévention tertiaire est l’ensemble des actes destinés à limiter ou réduire les déficiences et incapacités dues à une maladie ; elle intervient en aval et requiert des interventions relevant de secteurs beaucoup plus variés.
Ainsi, la scolarisation des enfants handicapés va dans le sens de la réduction des conséquences des pathologies et déficiences. L’état des lieux établi en 2008 par le groupe « prévention » sur la prévention du handicap chez l’enfant a mis l’accent sur la prévention secondaire et la prévention tertiaire. En distinguant deux périodes, la
petite enfance, de 0 à 6 ans, puis la période scolaire et universitaire, le groupe « prévention » a procédé à un premier repérage de l’existant, sans prétendre à l’exhaustivité.
A partir du constat ainsi élaboré, l’Observatoire formule quatre objectifs de progrès, déclinés en un certain nombre de recommandations. Le premier objectif est de mieux organiser l’offre de services concourant à la prévention. Le second objectif est d’améliorer la formation et l’information en matière de prévention. Plus
généralement, il faut développer une culture de la prévention, se traduisant par des réflexes et des savoir-faire. Ceci passe par la formation des personnels directement au contact des jeunes enfants ainsi que par l’information d’un vaste champ d’acteurs. Il importe à ce propos de rappeler que la famille est un lieu où s’exerce la prévention concernant l’enfant. Il est donc indispensable, à la fois, d’accompagner la famille pour l’aider à prendre en charge le handicap de son enfant et de l’associer
pour assurer l’efficacité des actions de prévention.
Le troisième objectif est de mener les études et recherches nécessaires pour répondre aux nombreuses questions qui se posent quant au fonctionnement de la chaîne dépistage – diagnostic – prise en charge, qui présente manifestement des imperfections. Enfin, pour améliorer ce qui relève de la prévention tertiaire et éviter le sur – handicap, le quatrième objectif est de mieux prendre en compte les besoins des enfants : meilleure évaluation des besoins de l’enfant en situation scolaire, reconnaissance de la spécificité des rythmes de développement de l’enfant handicapé, prise en compte des besoins des familles défavorisées…
La recherche sur l’emploi des personnes handicapées
L’état des lieux des connaissances fait apparaître que l’on ne dispose que de constats statistiques descriptifs. Il n’y a pas de réflexion sur les facteurs profonds qui rendent l’insertion et le maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés si difficiles malgré l’existence en France d’une politique incitative en la matière. L’Observatoire formule donc des préconisations pour inciter les administrations et organismes publics en charge des questions d’emploi, dont l’emploi des personnes handicapées, à développer la recherche sur ce thème.
Secrétariat de l’ONFRIH assuré par le Délégué Interministériel aux Personnes Handicapées 4, avenue Duquesne, 75350 PARIS 07 SP Tél: 01 40 56 63 05 – fax 01 40 56 68 20