Le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) dévoile les conclusions de son enquête sur l’accessibilité des campagnes présidentielles 2022 au regard du handicap
À l’approche des élections présidentielles 2022 qui auront lieu les 10 et 24 avril prochains, le CNCPH – Conseil national consultatif des personnes handicapées – publie le premier relevé de son « Observatoire de l’accessibilité des campagnes électorales et des scrutins de 2022 ». Pour ce premier volet, l’organisme représentatif a décidé d’évaluer l’accessibilité des campagnes présidentielles des différents candidats à l’élection. Nous vous proposons de découvrir ici les principaux constats qui en sont ressortis.
L’accessibilité des campagnes présidentielles sur la sellette à travers 4 critères
L’observatoire du CNCPH sur l’accessibilité des campagnes électorales et des scrutins de 2022 a publié son premier relevé : https://cncph.fr/releve1
Les 12 candidates et les candidats retenus pour ce premier relevé sont celles et ceux qui ont obtenu 400 parrainages et plus à la date du 3 mars 2022. La liste définitive des candidats au premier tour de l’élection présidentielle sera rendue publique par le président du Conseil constitutionnel lundi 7 mars 2022.
Pour ce premier relevé, l’observatoire s’est attaché à l’évaluation des campagnes selon quatre premiers critères :
– l’affichage sur le site des candidates et des candidats des informations relatives à l’accessibilité de leur campagne ;
– l’accessibilité des retransmissions simultanées des meetings ;
– la diffusion d’une version facile à lire et à comprendre (FALC) de la profession de foi et du programme des candidates et des candidats ;
– la diffusion d’une version en langue des signes française (LSF) de la profession de foi et du programme des candidates et des candidats.
Peu d’informations liées à l’accessibilité des campagnes présidentielles sur les sites des candidats
En premier lieu, les résultats de l’Observatoire démontrent que très peu de candidats affichaient des informations sur l’accessibilité de leur campagne au 4 mars 2022.
– Ainsi, une seule candidate, Anne Hidalgo, affichait une « charte d’accessibilité » portant sur l’ensemble de sa campagne dont ses meetings et indique un contact référent sur l’accessibilité.
– Seuls deux candidats, Jean-Luc Mélenchon et Fabien Roussel, affichaient clairement des informations sur l’accessibilité de leurs meetings.
– Un seul candidat, Emmanuel Macron, affichait une « déclaration d’accessibilité » avec le niveau de conformité du site au RGAA et indique comment contacter un interlocuteur en cas de difficulté ;
– Aucune information n’a été trouvée sur le site des 8 autres candidats.
Sourds et malentendants : des disparités dans l’accessibilité des retransmissions de meetings
Le CNCPH s’est ensuite penché sur les retransmissions des meetings des candidates et des candidats à travers leurs sites et réseaux sociaux des candidates et des candidats jusqu’à la date du 3 mars 2022. Il a relevé des disparités, selon les candidats, dans l’accessibilité des retransmissions des meetings, notamment au regard des personnes sourdes et malentendantes.
– Deux candidats, Jean-Luc Mélenchon et Anne Hidalgo, rendent visibles transcription simultanée et interprétation en langue des signes française, l’un sur une diffusion parallèle à la version tous publics, et l’autre directement sur la version unique.
– Trois autres candidats, Marine Le Pen, Valérie Pécresse et Fabien Roussel, ont rendu visible, au moins une fois, l’interprétation LSF de leur meeting, mais sans transcription simultanée.
– Un candidat, Yannick Jadot, a rendu visible la transcription simultanée pour deux de ses meetings, mais sans interprétation LSF.
– Un candidat, Éric Zemmour, a ajouté le sous-titrage a posteriori, après l’événement, sur la vidéo d’au moins un de ses meetings.
– Quatre autres candidats, Nathalie Arthaud, Nicolas Dupont-Aignan, Jean Lasalle et Philippe Poutou, n’ont assuré aucun dispositif d’accessibilité pour leurs meetings ou autres communications en direct.
– Le dernier candidat, Emmanuel Macron, a déclaré sa candidature le dernier jour de la période couverte par ce relevé et ne peut donc pas être évalué sur ce point.
En parallèle, le CNCPH constate, qu’hormis pour un candidat, Jean-Luc Mélenchon (même s’il recourt à une diffusion parallèle de la version accessible de ses meetings), la taille de l’interprétation LSF sur les images des meetings est trop petite pour être visible et permettre aux personnes de comprendre les propos.
« La charte de l’ARCOM sur la qualité de l’usage de la LSF dans les programmes audiovisuels recommande de que l’incrustation de l’interprète occupe 1/3 de l’image, a indiqué le CNCPH. Il est aussi courant sur les exemples examinés par l’observatoire que les interprètes soient mal cadrés et mal éclairés. Enfin, le recours au sous-titrage automatique des vidéos n’est pas pris en considération par l’observatoire, il n’apporte pas les garanties suffisantes à l’accessibilité effective des supports ».
Déficience intellectuelle, psychique ou cognitive : pas encore de version en Facile à Lire et à Comprendre
Au 4 mars 202, moment où le premier relevé de l’Observatoire a été établi, aucune campagne ne répondait encore au critère de la diffusion d’une version facile à lire et à comprendre (FALC) de la profession de foi et du programme des candidates et des candidats.
« La campagne officielle n’étant pas encore ouverte, les professions de foi en vue du 1er tour de l’élection présidentielle ne sont pas encore disponibles », commente le CNCPH.
Tous les candidats devront fournir une version FALC de leur profession de foi, il s’agit d’une obligation nouvelle pour ce scrutin : le décret du 31 mars 2021 relatif à l’élection du président de la République prévoit qu’en plus de l’enregistrement sonore et de la version électronique du texte lisible par un lecteur d’écran , « chaque candidat remet à la commission nationale de contrôle une version [de la profession de foi], rédigée dans un langage à destination des personnes en situation de handicap ou ayant des difficultés de compréhension. Ce langage privilégie l’usage des mots courants et l’emploi de phrases courtes associant des pictogrammes au texte ».
Les versions audios, électroniques et faciles à lire et à comprendre seront mises en ligne sur le site de la commission nationale de contrôle de la campagne électorale en vue de l’élection présidentielle. Sur le site du ministère de l’Intérieur, une fiche pratique sur le FALC destinée aux candidates et aux candidats pour les aider à améliorer l’accessibilité de leur campagne présidentielle.
Dans cette optique, l’observatoire recommande aux candidats de diffuser sans tarder leurs contenus faciles à lire et à comprendre sur leur site et leurs réseaux sociaux, en les signalant très clairement, et de ne pas se limiter à la seule profession de foi.
Les candidats invités à produire des professions de foi en langue des signes française (LSF)
Par ailleurs, le CNCPH rappelle que la diffusion d’une version en langue des signes française (LSF) de la profession de foi et du programme des candidates et des candidats n’est pas obligatoire, mais que ceux-ci sont invités à produire des versions bilingues langue des signes française – langue française de leur propagande.
En ce sens, l’observatoire recommande aux candidats de faire appel aux services de traducteurs qualifiés dont la LSF est la langue principale (le métier de traducteur de contenus étant complémentaire à celui d’interprète qui consiste, lui, à interpréter des interventions orales en temps réel). L’observatoire précise par ailleurs que des contenus peuvent également être traduits par des avatars « signants » en s’assurant qu’ils s’appuient sur une expertise linguistique réelle.
D’autre part, les spots de campagne officielle des candidates et des candidats qui seront produits par le service public de l’audiovisuel seront sous-titrés et traduits en langue des signes française par les équipes techniques de France Télévisions, seront diffusés à partir du 28 mars 2022 sur les chaînes publiques et en ligne, les conditions de diffusion, production et programmation faisant l’objet d’une décision de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, l’ARCOM (ex-CSA).
Pour aller plus loin, le CNCPH conseille aux candidats de se saisir de leurs propres spots ainsi accessibles pour les diffuser sur leur site et leurs réseaux sociaux, mais de ne pas se limiter à ces seuls clips pour diffuser des contenus accessibles en langue des signes française parce qu’ils présentent l’inconvénient d’être diffusés tardivement dans le calendrier de la campagne.
Sur ce point, l’observatoire relève l’initiative prise par l’équipe de campagne d’un candidat, Jean-Luc Mélenchon, de diffuser la traduction en LSF du programme du candidat sur une page du réseau social Facebook. Une autre candidate, Anne Hidalgo, annonce dans sa « charte de l’accessibilité » que sa profession de foi sera accessible en langue des signes française ainsi qu’une vidéo présentant ses mesures. Au 4 mars 2022, aucun autre élément répondant à ce critère n’était visible sur les sites et réseaux des dix autres candidats.